Antoine

Est-il étonnant de voir l’un des meilleurs restaurants de poissons de Paris, Antoine, serrer ses amarres le long des quais de Seine ? Ceux-ci ont le rivage chic du seizième arrondissement et le voiturier qui sied à son standing. Car de luxe il est ici question. Le décor de bord de boulevard hésite entre le jardin d’hiver et l’accastillage doré des yachts de la Méditerranée. Il affiche sa modernité à travers de belles sculptures et une cuisine ouverte briquée comme le pont d’un Riva avant l’appareillage. Un soin tout particulier est apporté aux arts de la table. Bien évidemment, les poissons servis ici sont de très belle extraction : Sole, Turbot, Bar, Saint Pierre (toujours de ligne et de petit bateau) et l’on trouve sur le banc de l’écailler l’aristocratie huitrière des Gillardeau et Tarbouriech.

Le chef, Thibault Sombardier, passé par les ors du Meurice, accommode tout cela avec un vrai talent de cuisson (parfaites) et d’assaisonnement (d’une justesse épatante) : « Râble de Lotte et cressons sauvages », judicieusement entrepris par quelques carottes glacées, « Chair de tourteau en feuille de concombre, féta foisonnée et huile de menthe » aussi fraîche qu’une déferlante atlantique et délicatement parfumée, « Gamberoni (gambas de la Méditerranée) grillés » juste ce qu’il faut avec une petite poêlée de radis roses craquante, la tête servie à part pour les amateurs de slurps que nous sommes. De la cuisine étoilée donc (une au compteur) mais pas ampoulée. Vive et tonique comme il se doit lorsque l’on parle de marée.

L’addition pourrait susciter une petite tempête mais le très convenable menu déjeuner à 35 € vous fera naviguer vers des eaux plus tranquilles.

Thierry Richard