Gastronomie
5 antisèches sur le caviar
29 DéCEMBRE . 2014
Rendu prestigieux par les tsars
Les tsars de Russie ont été les meilleurs ambassadeurs du caviar. Les raisons de leur entichement pour ce mets de luxe sont pourtant cocasses. Au XVIe siècle, Ivan le Terrible, premier tsar de Russie, annexe le khanat d’Astrakhan. Il obtient ainsi un accès à la mer Caspienne (la plus grande étendue d’eau enclavée au monde) où l’esturgeon est pêché avant tout pour sa chair. La caste guerrière des cosaques, qui veille sur la sécurité des pêcheries, doit payer chaque année un écot au tsar. Elle s’en acquitte à reculons, en envoyant seulement quelques fourrures et de petits tonneaux de caviar. Une provocation ! À l’époque, les œufs de caviar nourrissent les familles modestes qui ne peuvent s’offrir de la chair d’esturgeon, bien plus recherchée… Pourtant, c’est le succès à la cour. Le caviar devient monopole impérial en 1675 avec Alexis Ier. L’essor des chemins de fer, au XIXe siècle, lui permettra de conquérir les tables du (beau) monde en restant frais.
Une production française à la pointe
De même que l’esturgeon sauvage de la mer Caspienne a disparu dans les années 1990 (pollution, surpêche…), il n’y a plus d’esturgeons sauvages en Aquitaine depuis la fin des années 1960. On y élève toutefois depuis les années 1990 l’espèce Acipenser Baerii (ou esturgeon sibérien) dans des fermes aquacoles. Ce poisson, qui s’épanouit dans l’eau douce, comme le tiers des espèces d’esturgeons, atteint sa maturité sexuelle en sept ans. Chaque femelle donne, après abattage, entre 500 g et 2 kilos de caviar. La France est aujourd’hui le deuxième producteur mondial, derrière l’Italie et devant la Chine, avec 23 tonnes en moyenne (la Russie n’est que 5e). En 2012, la production mondiale était de 150 tonnes.
Des œufs, du sel…
Lorsque les œufs sont extraits du poisson, ce ne sont encore que des œufs d’esturgeon. D’ailleurs, on devrait plutôt parler de follicules ovariens, puisque ces derniers n’ont pas été fécondés. Mais passons. Ce n’est qu’au moment où du sel est ajouté que l’on obtient le précieux caviar. La durée d’affinage va permettre de faire évoluer le goût. Chez Sturia, figure de proue du caviar en France, il faut compter 4 semaines pour le Primeur, de 3 à 8 mois pour le Vintage et plus de 8 mois pour le caviar Origin.
Le caviar de Noël, subtil et rare
Ultra-frais, affiné quelques jours à peine, le caviar de Noël est uniquement disponible en décembre. Il a été récolté à peine dix jours avant d’être mis en vente. Une production très subtile aux saveurs de noisette fraîche, idéale pour s’initier. Seule la maison Sturia le propose. Encore quelques jours pour en profiter et magnifier le grand saut dans l’année nouvelle.
Le champion du hors-piste
Au-delà de l’habituel mariage pomme de terre – crème, le caviar se prête aux accords les plus inattendus : sur un toast de foie gras pour une alliance terre-mer explosive, sur une huître, un œuf mollet ou encore – notre coup de cœur – sur le crémeux d’un Brillat-Savarin.
Guillaume Tesson
À lire : « Caviar, manuel décomplexé à l’usage de l’amateur », de Charles de Saint-Vincent
Chronique éditions, 168 p., 25 € (vous pouvez passer commande ici).
En vente depuis le 28 novembre, cet ouvrage indispensable met en lumière l’or noir avec érudition et pédagogie. Après avoir longtemps œuvré dans le marketing pour des grands groupes, l’auteur a tout quitté à l’âge de 35 ans pour vivre pleinement sa passion : le caviar. Il a ressuscité la société créée jadis par sa famille, Boutary, pour laquelle il recherche les meilleurs caviars à travers le monde.