Gastronomie
Le street artist Vhils fait bon mélange avec Hennessy
21 JUIN . 2018
Il y a comme un air de hip hop sur les quais de la Richonne. Le beat résonne entre les pavés et les murs qui abritent le siège historique de la maison Hennessy. Inhabituel sur les rives de la Charente, d’ordinaire plutôt bercée par le chant des oiseaux. Au fond d’une cour un DJ mixe sur des caisses de Hennessy Very Special estampillées « Limited edition by Vhils ». Dans les verres, le degré d’alcool en ce premier jour d’été est presque aussi élevé que la température extérieure, puisque le thermomètre affiche 35°C. Les ventilateurs brumisateurs tournent à plein régime. Vhils ? Alexandre Farto, artiste lisboète de seulement 31 ans.
Par Aymeric Mantoux
Issu du street art, repéré par la légende Banksy, ses œuvres s’arrachent désormais en ventes aux enchères. Devenu une star de l’art contemporain, de Shangaï à Luxembourg, il est représenté par la galeriste vedette Magda Danysz. « Vhils aussi est quelqu’un de very special, confie-t-elle. Ce qui fait sa singularité, c’est son travail sur les couches d’histoire derrière les murs de la ville. En grattant les couches d’affiches, il va plus loin, il va chercher du sens.
Derrière un processus fascinant comme son travail à l’acide sur des plaques de métal, apparaissent des choses qui font écho à nos madeleines de Proust personnelles. Ce sont des paternes comme des éléments de la ville, des végétaux ». Pour la première fois, Vhils s’est prêté au jeu de la collaboration avec Hennessy, réalisant des œuvres en lien avec les motifs de la maison. Elles se retrouvent aujourd’hui sur le packaging et l’édition limitée Hennessy VS Vhils, le cognac le plus vendu au monde (rien que ça !), et exposées à Cognac.
L’exposition démarre par les archives qui ont nourri le travail de l’artiste. Il a dressé un parallèle entre les pierres des murs de Lisbonne et les pierres lithographiques qui étaient utilisés pour produire les étiquettes Hennessy au XIXe siècle. Dans les œuvres en papier et métal réalisées par Vhils, on retrouve les symboles de Hennessy, le bras armé, les 3 étoiles, les grappes de raisin, le damier, entre autres éléments iconographiques du passé, bien entendu revisités, remixés subtilement.
A chaque fois, l’artiste creuse dans les couches du temps et fait remonter à la surface des matières, des couleurs, des motifs. On retrouve cela dans la série limitée : pour lui, les différences de matières sont autant de sens différents. Si les murs ont plusieurs couches, c’est qu’ils ont des facettes et des histoires à découvrir. Ce faisant, il bouscule les certitudes, questionnant ce qui est visible de ce qui ne l’est pas. On peut y voir aussi un message social. On n’aurait pas tort. Il y a aussi ce polystyrène, des extrusions de mur. « De face, c’est comme si le visage venait nous parler, confie Vhils. De cote c’est une skyline, en écho au coté urbain de mon travail. Il y a toujours plusieurs niveaux de lecture. Je joue, j’expérimente, avec mon équipe qui le suit partout ». Ce qui caractérise Vhils en dehors de son histoire dans l’art urbain, c’est sa capacité à savoir expérimenter. Il transforme, détruit, reconstruit, réinvente. Il tord la réalité et en fait autre chose. Il est fascinant.
Les points communs avec Hennessy, me direz-vous ? Ils sont nombreux. Mais avant tout, c’est le rapport avec le temps. Le cognac est par nature une œuvre qui nécessite du temps. Il faut également être capable de tenir dans le temps une création. Que 10 ans, 100 ans plus tard, cette création soit la même. Identique. Immobile.
Là, la maison confronte ces piliers avec le travail artistique qui par nature est un bon capteur du temps. Elle met face à face des icônes de la création actuelle avec une icône qui remonte pour certains flacons au début du XIXè. Le savoir-faire, manuel, le respect de la tradition, en sont d’autres. Ce ne sont pas les seules.
L’autre actualité en parallèle a lieu actuellement au 104 à Paris : une grande exposition où l’on retrouve Vhils présenté technique par technique avec de magnifiques installations. Entrez dans l’étonnante planète Vhils… Egalement une exposition à la galerie Magda Danysz, complémentaire, où vous pourrez acquérir les bétons extrudés, qui figurent parmi les dernières pièces produites par l’artiste. En attendant, pour conjurer la chaleur estivale, le cocktail du jour, c’est le sunset : Hennessy VS, eau gazeuse, jus de citron, sirop d’agave. Une splendeur.
A.M.