Gastronomie
Gare de Lyon : le retour du grand Bleu
04 MARS . 2019
C’est sans aucun doute l’un des plus beaux restaurants de Paris et une part importante de sa mémoire gastronomique. Mais cela faisait bien longtemps que le Train Bleu n’aiguisait plus les appétits parisiens. Les choses ont-elles changé depuis l’arrivé des Rostang en cuisine ? C’est ce que nous sommes allés vérifier. En voiture, s’il vous plaît !
Par Thierry Richard
(Texte et photographies)
Pour qui s’intéresse un peu à la gastronomie parisienne ou, plus simplement, pour tout voyageur ayant un jour glissé ses valises dans la salle des pas perdus de la Gare de Lyon, en attendant de se laisser porter vers le soleil, le Train Bleu est ce monument dédié tout entier, et depuis 1900, à la gastronomie française. C’est que l’histoire est belle. Imaginez vous un vaste restaurant construit pour l’exposition universelle de 1900, dans un style opulent flirtant avec le baroque, et qui, des décennies durant a vu se succéder sous ses plafonds peints et dorés aussi bien Edmond Rostand que Coco Chanel ou Jean Gabin.
Lustres majestueux, fresques imposantes, parquet d’époque, boiseries en ribambelle, sainte trinité 1900 des moulures-dorures-sculptures, peintures signées des artistes reconnus du début XXème, tout ici est un spectacle pour les yeux et, ayant poussé la porte à tambour, on s’en veut de les avoir si longtemps négligés.
Car il faut bien avouer que l’aura du “Buffet de la Gare de Lyon” (ancien nom du Train Bleu) avait faibli ces dernières années jusqu’à n’être plus au yeux des parisiens qu’une façade et son escalier monumental, un décor devant lequel passer sans même penser s’y arrêter. Mais les choses changent. C’est aujourd’hui la famille Rostang, et au premier rang Michel Rostang, double étoilé Michelin qui supervise le contenu de la carte et des assiettes.
Et ce n’est pas une mince affaire lorsque l’on sait que dans ces salles classées en 1972, on sert près de 400 couverts par jour ! Difficile dans ces circonstances de produire une cuisine de grande qualité. Et pourtant… On retrouve désormais au Train Bleu ce que l’on aime chez Rostang : le respect des produits de saison, une profonde tradition à la française et un savoir-faire gastronomique qui n’a peur ni des sauces, ni des jus.
Les “Ris de veau et asperges vertes au sautoir, jus de veau aux écorces d’orange” sont délicieusement bien préparés, fondants et croustillants, et servis généreusement pour une entrée. Les “Ravioles de Roman et langoustines rôties, crème de crustacés, champignons bouton et herbes fraîches” développent leur goût puissant et raffiné dans une très belle vaisselle bleutée. La “Poulette pochée sauce suprême, risotto à la truffe” vous enrobe le palais comme une robe de Valentino le corps d’une jolie femme. Avec douceur, style et caractère.
Le must à ne pas louper (c’est même le plat unique du menu du Voyageur), servi à la voiture de tranche comme jadis, est le “Gigot d’agneau de nos régions rôti, gratin dauphinois de la Maison Rostang”. Découpé devant vous, garni de son ail en chemise, saturé de jus et d’une tendreté évidente, il ravira les amateurs. On regrettera juste une certaine fadeur dans la réalisation du gratin dauphinois en qui nous avions placé tant d’espoirs… Côté dessert, de la tradition encore mais non dénué de modernisme avec un “Saint-Honoré” de bel acabit, très vanillé, à la crème à l’onctuosité parfaite.
Aucun doute, l’adresse est belle, dotée d’un service ne manquant pas d’allant, et renoue avec une cuisine digne de ce nom. Elle est cependant assez violemment tarifée lorsque l’on sort des menus. Le prix du spectacle sans doute.
T.R.
Le Train Bleu
Gare de Lyon
Place Louis Armand
75012 Paris
Téléphone : 01 43 43 09 06
Ouvert tous les jours
Menus à 49 €, 65 € et 110 €
Menu enfant à 25 €
A la carte compter autour de 80 €
Métro : Gare de Lyon