Auto
Goodwood Festival of Speed, quand les Anglais roulent des mécaniques
09 JUILLET . 2019
Moins folklorique que son cousin Revival, le Festival of Speed est l’une des trois glorieuses du calendrier automobile des grands bretons. Si le Members Meeting ne concerne que les adhérents , le “FOS” demeure un événement incontournable pour tout bon amateur de mécanique qui se respecte. Retour sur l’édition 2019 qui vient de se clôturer, année anniversaire par excellence… Entre showrooms démesurés, courses de côte, plateaux d’exception et bonne humeur contagieuse, en matière automobile il y a toujours de bonnes raisons de filer à l’anglaise…
Par Laurène Bigeau (texte et photographies)
God save Lord March ! Il n’y a qu’un Anglais, désormais Duc de Richmond, pour avoir eu le bon goût d’ouvrir le parc de son château et partager avec le grand public sa passion automobile. Si nos voisins d’outre-manche appuient quelque peu sur les freins pour sortir de l’Europe, ils ne sont pas en reste pour ériger des événements dont le niveau et la qualité d’organisation auraient franchement de quoi nous laisser, pauvres Français, bien songeurs.
A Goodwood, le spectacle commence toujours dès le parking, au cœur des champs qui encerclent le parc du château. Situé à une centaine de kilomètres de la capitale anglaise en direction de la côte de Portsmouth, la campagne est jonchée d’élevages de chevaux dont les versions motorisées n’hésitent pas à se tirer la bourre sur la route de Chichester. Il y a de quoi passer quelques minutes à contempler les autos stationnées en file indienne, tels des pur-sangs endormis, patientant sagement qu’un propriétaire délicat vienne les sortir du boxe. Ferrari 458 Speciale, Caterham en nombre, Fiat Dino, Aston en tous genres, on serait presque tentés de rester là, sauf qu’il est 10h et qu’un soleil insolent annonce déjà les prémices d’un teint rosé (très local).
Une bonne vingtaine de minutes de marche à travers le parc longeant le Golf Maison, le tout ventilé par les allers et venues des hélicoptères, et c’est un immense pavillon Michelin qui donne le là. La force du FOS, c’est l’intérêt qu’il déploie, les constructeurs savent en profiter pour présenter leurs nouveautés à une clientèle dont on connaît non seulement l’intérêt, mais également le porte-monnaie… Même si le festival se veut ouvert au plus grand nombre, il faut quand même débourser 40 pounds par jour pour en être, une manière de trier par le haut, et ça, les marques l’ont bien compris !
Dans les paddocks hyper cars, ça se bouscule au moindre son de V8 ou de V12 pour venir voir la bête en furie. Angleterre oblige, Aston, Mc Laren et Lotus s’en donnent à cœur joie. Côté italien, pendant que des feulements annoncent qu’il se passe quelque chose du côté de la Scuderia – tous les yeux étant braqués sur la P80C, exemplaire unique et caprice d’un homme d’affaires Hongkongais – on s’éloigne en direction de chez Dallara. Bien connue des amateurs de sport auto pour la qualité de ses châssis, la marque transalpine commercialise sa Stradale, première version homologuée route. Compter quand même 200 000€ pour chatouiller le 4 cylindres de 400 cv hérité de la Focus RS, mais quand on aime…
A l’approche du château, l’espace Cartier concentre de rares modèles des marques Abarth, Voisin ou encore Bentley et rend hommage au coup de crayon légendaire de Zagato. 2019 est l’année de toutes les célébrations automobiles, si De Tomaso souffle ses 60 bougies autour d’une rétrospective allant de son tout premier modèle, la Vallelunga, aux modèles plus connus comme la Pantera ou encore la bestiale Mangusta, la marque est surtout venue en fanfare présenter son dernier bébé, la P72 : 72 pour le nombre d’exemplaires, quant à ce qui se cachera sous le capot, le mystère demeure entier !
Anniversaire toujours, celui de la star du Festival, Bentley, qui célèbre 100 ans de passion automobile. La manufacture continue sa production dans les ateliers de Crewe, une petite ville proche de Manchester, et organise cette année son centenaire en grande pompe.
Au FOS, on a eu la chance d’admirer, là aussi, une rétrospective de taille. Des modèles ayant gagné le Mans dans les années 1920 -qu’Ettore Bugatti s’amusait à appeler les “camions les plus rapides du monde” – aux Continental des années d’après-guerre, suivies des fameuses déclinaisons des séries R et T, de quoi y perdre son anglais ! Parmi les raretés on notera la présence d’une berline 8 litres et d’une Continental GT flanquée là encore, d’un Z qui veut dire Zagato ! 60 ans également qu’Aston Martin gagnait les 24h du Mans, de quoi suspendre une DBR1 en haut du traditionnel édifice géant, qui trône sur la pelouse faisant face au château. Pour jouer au grand frisson, rien de tel qu’un tour à l’espace Bonhams pour naviguer entre les belles promises à la vente, au choix une Ford GT40, le prototype de la Mc Laren P1, ou encore le Land Rover Spectre, un Defender bodybuildé piloté par Daniel Craig dans le dernier opus de 007, parti au coup de marteau de 316 000 livres….
Tout cela donne un peu chaud. Il est grand temps de s’abreuver avec un pichet de Pimm’s à l’ombre des arbres centenaires du parc, ou de siroter une coupette de Clicquot en cherchant de quoi reprendre des forces ! Burgers, organic sausages ou encore Lobster Rolls : au FOS il vaut mieux déserter les restaurants “installés” pour grignoter sur le pouce sur les nombreuses tables situées de part et d’autre de la piste balisée de bottes de pailles, so country. Une fois que la crise d’hypoglycémie s’éloigne, on peut attaquer les showrooms des constructeurs qui redoublent d’inventivité pour appâter le visiteur…
Chez Ford on s’élance façon fête foraine du haut du toit, chez Caterham on se fait des sensations en faisant joujou dans les simulateurs de postes de conduite, tout comme chez Toyota où l’on s’affronte derrière la LMP1 numéro 8 de l’équipage Alonso/Buemi/Nakajima, fraîchement victorieuse au Mans. Chez Citroën, l’ADN avant-gardiste se poursuit à travers deux concept cars électriques, chez Volkswagen on fait connaissance avec le T Roc R et on découvre les prototypes de la nouvelle Golf et du Combi. Lâcher de taureaux chez Lambo, gomme à tout va chez Michelin…
Gardons le meilleurs pour la fin, les paddocks d’anciennes… Un dizaine de Porsche 917 en livrée Gulf Racing, Abarth de course, une douzaine de F1 ayant marqué le palmarès de la Scuderia, des nuées d’Aston Zagato, 250GTO… Toutes ont marqué de leur empreinte l’histoire de la course automobile, et font retentir leurs cylindrées pour le plus grand plaisir des oreilles, lors de la course de côte qui se déroule le week-end dans l’enceinte du château.
Autre spécificité anglaise, l’accessibilité des autos… Au cœur de ces paddocks le public croise pilotes illustres et mécaniciens, tout en pouvant tourner autour des bolides, on est loin des traditionnels cordons les isolant telles des toiles de maîtres.
18h : l’heure de pointe au parking, notre Delta Integrale est dans les roues d’un V8 bi turbo AMG lequel roule collé-serré derrière une Ferrari 599GTB. Au loin, on aperçoit une Type-E, puis une Lotus Exige, ça sent le jasmin le long des routes sinueuses et la campagne est si belle….
Goodwood FOS c’est déjà terminé, on aura une nouvelle fois profité d’une organisation sans faille, d’un parterre d’autos à couper le souffle et d’une ambiance unique au monde, il n’y a bien que les Anglais pour organiser des feux d’artifice en pleine journée ! De quoi s’interroger (à nouveau) sur un évènement en France qui redonnerait l’envie aux constructeurs ayant déserté le salon de l’auto, de reconquérir notre marché, on peut toujours rêver, en attendant, il est l’heure de recommander un Pimm’s !
L.B