Eros
André Masson
L'érotisme poétique du surréalisme
08 SEPTEMBRE . 2020
On vous avait déjà parlé des surréalistes (ici et là) et de leur amour pour le sensuel… André Masson, figure incontournable du mouvement surréaliste, n’a eu de cesse de livrer une production artistique singulière marquée par les mythes, la nature, la poésie et bien sûr, l’érotisme. Découverte.
Comment résumer l’existence complexe et bouillonnante d’André Masson ? Né en 1896 dans un petit village de l’Oise, il part très jeune vivre à Bruxelles, ville dans laquelle il se forme très tôt à la peinture à l’Académie royale des beaux-arts.S’ensuivent des voyages à travers l’Europe où il découvre la Toscane et Berne… avant que la guerre n’éclate. Envoyé au front, il est grièvement blessé et s’en sort de peu. Cette expérience décisive marquera sa vie. Et à travers son œuvre qui provoque sans cesse, il n’aura de cesse de questionner son sens.Se souvenir que la réalité est cachée, qu’il faut la faire exploserL’approche artistique de l’artiste pourrait se résumer à ses quelques lignes écrites dans Métamorphose: « Se souvenir que la réalité est cachée, qu’il faut la faire exploser ». Associé au mouvement surréaliste, qu’il intègre dès 1924, André Masson est avant tout connu pour ses « dessins automatiques » – inspirés du principe de l’écriture automatique qui permet de créer une œuvre tout en s’émancipant de la raison – et par la réalisation de « tableaux de sables », qu’il réalise en disposant de la colle de manière aléatoire sur une surface avant d’y ajouter du sable.
La nature, vivante et sensuelle
Mais la vision singulière de Masson s’exprime avant tout à travers des thématiques complexes et poétiques. Par le biais d’un univers très personnel, il construit un monde onirique marqué par l’élaboration d’une mythologie violente et érotique.Au début des années 1920, il a pour projet de « faire entrer la philosophie dans le tableau ». Pour cela, il s’inspire de la nature qu’il érige en tant que symbole de la vie. Dans l’œuvre Les Quatre Éléments dans laquelle il représente l’air, le feu, la et la terre dans une composition aux inspirations cubistes, il intègre à l’arrière-plan, une silhouette féminine, créatrice du cosmos. Pour Masson, la nature n’est jamais nature morte. Elle est vivante, sensuelle.Éros et Thanatos semblent jalonner sa pensée et le sentiment amoureux s’infiltre peu à peu dans ses œuvres. Dans La Métamorphose des amants, il représente la fusion de deux êtres aimés. Ici, l’acte amoureux donne à voir une étreinte ardente marquée par la fusion des corps. Cette scène, hors de toute temporalité, semble n’avoir aucune limite.« Que voulez-vous exprimer dans votre œuvre ? – Exprimer, avec les moyens de la peinture, les rapports intimes et secrets des choses, les correspondances et les analogies. » – André MassonCette dichotomie entre nature et sensualité trouve son paroxysme lorsqu’en 1955, il crée un tableau à la demande de Sylvia Bataille et Jacques Lacan… afin de dissimuler l’un des plus grands scandales de l’histoire de l’art : L’Origine du Monde de Gustave Courbet (souvenez-vous, on vous en parlait ici). Pensé comme un cache que l’on appose sur l’œuvre de Courbet, Masson réalise alors un paysage surréaliste, Terre Érotique, dans lequel il réinterprète le motif de la toile. Et c’est précisément en reprenant les formes originelles du tableau de Courbet tout en les transposant au sein d’une nature flamboyante qu’il réalise la plus belle des fusions : Le corps féminin et le paysage ne font plus qu’un (image à la une, ndlr)