Gastronomie
Dans les coulisses de la vente des vins des Hospices de Beaune
Épisode 1 : au cœur du Domaine des Hospices civils de Beaune
22 OCTOBRE . 2020
Bienvenue dans les coulisses de la mythique vente caritative des Hospices de Beaune ! L’évènement, bien connu des connaisseurs, mythique, prestigieux et international, transforme trois jours durant la ville, chaque 3e week-end de novembre. L’occasion d’accéder à des flacons rares… Et, cette année, de rendre hommage au personnel soignant exposé aux premières loges d’une épidémie loin d’être endiguée. Avec notre série, articulée autour de trois figures majeures -le domaine des Hospices de Beaune, la maison de négoce Albert Bichot et la maison de ventes aux enchères Christie’s- vous serez paré pour attaquer la 160e édition qui se déroulera le 15 novembre. De quoi posséder les clefs pour participer, vous aussi, à ce grand élan de solidarité tout en accédant à des vins d’exception ! Aujourd’hui, le domaine des Hospices de Beaune.
Il n’est d’amateur de vin qui n’ait entendu parler de la vente des Hospices de Beaune… Si l’événement, qui transforme la ville en carrefour mondial du vin, où la fête bat son plein, fait rêver bon nombre de connaisseurs, peu peuvent se targuer d’en maîtriser les rouages. Voyage au cœur de la Bourgogne mystique où plane encore l’aura des moines cisterciens et immersion dans les entrailles de cette vente internationale prestigieuse.
Les Hospices de Beaune, de l’hôpital aux vignes
Un peu d’histoire. Au commencement de l’histoire des Hospices Civils de Beaune, il y a avant tout un hôpital. En 1443, la Guerre de Cent ans a fait rage et laissé en chemin bon nombre de « pôvres » et de nécessiteux dans son sillon. Cet état de désolation inspire à Nicolas Rolin -alors chancelier du Duc de Bourgogne- et son épouse Guigonne de Salins, la construction d’un édifice ayant vocation à dispenser des soins aux désœuvrés de la région.
Son architecture unique, avec ses toits en tuile vernissée emblématique de la région et sa grande cour carrée font de l’Hôtel Dieu un monument indissociable de l’imagerie beaunoise qui attire chaque année quelques milliers de visiteurs.
Pour des nécessités de modernisation, l’Hôtel Dieu a laissé la place en 1971 à un centre hospitalier de dernière génération aux portes de la ville. Et comme pour joindre l’utile à l’agréable, le Domaine des Hospices Civils est également propriétaire d’un domaine viticole de 60 hectares de vignes, constitué au fil des années de legs et donations. Il comprend 50 hectares en pinot noir et 10 hectares de chardonnay, plantés en premiers et grands crus sur les appellations les plus prestigieuses de la Côte d’Or. Aux commandes de la « machine Hospices », une femme.
Ludivine Griveau, aux commandes des Hospices
Ludivine Griveau est une jeune quadra pleine d’énergie et d’envies. Enfant du pays, de Tournus en Saône-et-Loire (village bien connu des gastronomes), elle se destinait à l’origine à être ingénieur agronome. En fin de cursus, son école se rapproche de l’Université de la Vigne et du Vin et propose alors aux deux meilleurs élèves, dont elle fait partie, de passer le diplôme d’œnologue. Ludivine anime alors le club d’œnologie de son école et relève le pari de cette formation dense et accélérée pour valider deux diplômes concomitants d’ingénieurs et œnologue.
Après quelques stages elle se voit confier la direction technique -à seulement 26 ans- du Domaine Corton André à Aloxe Corton, autre figure de carte postale burgondes avec son château à tuiles vernissées. Elle y restera 11 années, accomplissant sa tâche avec passion et se rapprochant peu à peu du Domaine des Hospices. « La Maison Corton André était acheteuse à la vente, je m’occupais donc d’assurer l’élevage des vins dont nous faisions l’acquisition pour nos clients. »
Un premier contact et des échanges réguliers avec Roland Masse, précédent régisseur, qui un jour lui fait part de son départ prochain en retraite, et lui suggère de postuler à sa succession. « Sur le moment j’ai mis cela dans un coin de ma tête, j’étais bien dans ma vie professionnelle et peut-être que je ne m’en sentais pas forcément les épaules ».
Quelques mois plus tard, Roland la relance, l’idée fait son chemin… Elle postule à la dernière minute et devient en 2015 la première femme régisseuse de l’institution beaunoise : « je crois que je ne réalise toujours pas ! »
Elle postule à la dernière minute et devient en 2015 la première femme régisseuse de l’institution beaunoise
Secondée par une vingtaine de vignerons, Ludivine « vit, dort, mange et respire pour les Hospices de Beaune », un engagement presque sacerdotal qui fait écho à la dimension de soins et de services inhérentes aux Hospices. Certes, il y a le plaisir non dissimulé de vinifier des vins fabuleux, mais ce qui la porte « c’est le fait d’apporter au quotidien sa pierre à l’édifice qui l’investit d’une responsabilité supplémentaire. »
Cette année, la pièce des Présidents est offerte conjointement par le Domaine des Hospices et le Château de Chambord. Cette pièce unique et exceptionnelle de Clos de la Roche Grand Cru est dédiée au personnel soignant qui a su une fois de plus témoigner de son professionnalisme en première ligne de l’épisode COVID 19. Quand elle parle des Hospices de Beaune, Ludivine ne cache pas son enthousiasme et son émotion. Pour elle, avoir l’honneur d’y faire du vin, c’est avant tout servir une cause noble et il n’y alors pas plus beau métier que le sien…
Le 15 novembre, Ludivine sera sous la Halle pour assister à la vente orchestrée par la Maison Christie’s de « ses bébés », dans laquelle un autre enfant du pays, Albéric Bichot – représentant de la maison de négoce beaunoise Albert Bichot – viendra lever la main comme chaque année et toujours pour la bonne cause. A suivre dans nos prochains volets, les portraits des maisons Albert Bichot et Christie’s…
L.B