Auto
Quand André Courrèges habillait l’automobile
01 OCTOBRE . 2020
André Courrèges était l’un de ces géniaux touche-à-tout : ingénieur des ponts et chaussées de formation, il deviendra couturier de renom. Comme tous les domaines d’expression artistique le passionnent, il étend son art à la sculpture, la peinture et bien sûr… l’automobile. Avec style !
Deux grands créateurs ont habillé les années 60 : Mary Quant à Londres et André Courrèges à Paris. On ne sait pas avec certitude qui de l’un ou l’autre a inventé la mini-jupe mais les lignes simples et modernes des collections Courrèges illustraient, pour sûr, l’anticonformisme naissant.
Couturier synonyme d’émancipation féminine, André Courrèges aimait le blanc plus que tout. Un blanc immaculé souvent associé à des couleurs pastel. Entre innovation, minimalisme décoloré ou mauvais goût assumé, passons en revue quelques automobiles signées Courrèges.
1. 1969 : Courrèges Bulle
Coqueline, la femme d’André, aime aussi l’automobile. Un héritage familial puisque son père participait à des courses en Bugatti ! Dès 1969, elle présente Bulle lors d’un défilé. Une maquette de petite auto électrique, avec une batterie au plomb de voiture pour enfant.
Dans une interview donnée au magazine Intersection en 2009 elle expliquera : “ Mon raisonnement, c’est comment aller d’un point à un autre en prenant le moins de place possible, en roulant moins vite et en ne consommant rien.” Visionnaire !
En 1997, l’envie de rendre Bulle fonctionnelle prend à Coqueline. C’est chose faite en 2002. Suivront une série de prototypes électriques qui participeront au Bibendum Challenge organisé par Michelin. Le salon international des inventions de Genève lui décernera un brevet d’invention pour ses autos électriques mais aucune ne sera commercialisée.
2. 1974 : Matra Bagheera Courrèges
Il était logique qu’André Courrèges collabore avec le jeune constructeur Matra, fort de ses expériences aérospatiales et d’idées à la pointe. En 1973 le coupé Bagheera à trois places de front remplace la 530. Anticonformiste, il incarne une certaine idée du futur automobile français. Et le blanc satiné des versions Courrèges lui va comme un gant !
Le traitement Courrèges passe aussi par le nuancier de couleurs intérieures : sièges et garniture de pavillon en cuir blancs (faits main), tableau de bord beige, pommeau de levier de vitesse, tapis et sacs à main siglés. Oui, la Bagheera Courrèges est livrée avec une paire de sacs à main amovibles montés sur la porte.
Il ne s’agissait ni d’un concept-car ni d’une série spéciale puisque la Courrèges est intégrée à la gamme. Une seconde version voit le jour en 1976 avec la Bagheera Série 2, les sièges passent du beige au blanc. Seuls 216 Courrèges Série 1 et 163 Série 2 ont été produits sur 47796 Bagheera.
3. 1983 : roues André Courrèges x Yamaco
Les japonais adoraient Courrèges. André a donc l’idée géniale de lancer une gamme de… roues pour automobiles. Le fabriquant japonais Yamaco Corporation se charge de la fabrication et de la distribution, exclusivement sur l’archipel japonais.
Le plus cocasse demeure la série de publicités alors diffusée dans la presse japonaise. On note l’abus des couleurs blanches, roses ou bleues et la présence de jeunes femmes pratiquant toutes sortes de sports sans rapport avec l’automobile : patin à roulettes, ski, natation… Des slogans amusants “Go crazy, have fun !” à des années lumières des pratiques habituelles dans le milieu des roues et autres accessoires automobiles.
Pour preuve, une clientèle citadine et féminine était visée et plus particulièrement celles qui roulaient en kei cars, ces petites autos de villes favorisées fiscalement. Elles possédaient probablement d’autres produits Courrèges. Ainsi les roues de leur automobile devenaient accessoires de mode comme un sac, un blouson ou une mini-jupe ! Brillant.
4. 1986 : Santana S-410 Courrèges
Milieu des années 1980, le 4x4devenait branché. Sa bouille craquante et sa taille microscopique font du Santana un engin tout à fait adapté en ville ou dans les stations balnéaires. André Courrèges s’allie avec la marque pour une série limitée qui en jette. Septembre 1986, elle se dévoile à Paris en compagnie de l’actrice Clio Goldsmith et de plusieurs mannequins, lors d’une soirée organisée par Courrèges baptisée La nuit.
Jantes larges, pare buffles, tubes de bas de caisses, pare-chocs, rétroviseurs et protège roue de secours se parent de chrome. Une bande bleu pastel court le long de la caisse jusque sur la porte de coffre. Capot, arceau, calandre ou entourages de phares sont peints en gris argent métallisé.
Le volant sport est gainé de cuir blanc et tout est assorti en imitation cuir : tableau de bord, sièges, contre porte… Pour la promo, le Santana Courrèges fera le tour des stations de skis pendant la saison hivernale, avec deux charmantes hôtesses. Et il sera même, dans ce but, souvent descendu dans les boîtes de nuit, sur le dancefloor… par les escaliers !
A.M