Gastronomie
Week-end proche de Paris : le Domaine Les Bruyères
Et autres bonnes adresses
17 MARS . 2022
Au Domaine les Bruyères, dans les Yvelines, Cybèle et Franck Idelot ont créé un havre de paix et d’engagement, restaurant, potager et chambres. Visite de leur petit paradis, dans une région où les bonnes adresses ne manquent pas, à l’occasion d’un week-end proche de Paris. Ma campagne est cybèle !
Cybèle et Franck Idelot étaient venus à la campagne pour cultiver leur jardin. Un grand potager dont les récoltes alimenteraient tout au long de l’année leur restaurant de Boulogne-Billancourt, La Table de Cybèle. Mais, dans la Haute Vallée de Chevreuse, à Gambais (Yvelines), où l’on s’y connaît en fourneau (c’est la ville où a sévi le sinistre Landru), ils ont trouvé bien plus qu’une source d’approvisionnement : une source d’inspiration. Cybèle s’appuie désormais sur une solide équipe boulonnaise, qu’elle accompagne le mardi et le mercredi, pour mieux s’échapper du jeudi au lundi par l’A13, puis l’A12 et enfin la Nationale 12, sortie 17 à La Queue-lez-Yvelines. On les rejoint, le temps d’un week-end proche de Paris…
Sur le long toboggan qui mène vers le Château de Neuville, propriété de la famille de Labriffe, on s’arrête sur la droite, au lieu-dit les Pideaux. « On n’a pas de problème pour arroser, ça vient de « pieds dans l’eau » », s’amuse Franck en montrant le sol fertile du parc arboré de 1,5 ha, situé dans le lieu-dit des Pideaux, comprendre les pieds dans l’eau. Née en Californie, Cybèle y retrouve le goût de l’enfance, des légumes du jardin de ses parents, cultivés en bio sans avoir besoin de le dire. Ici non plus, aucun intrant, un permaculteur façonne plusieurs fois par semaine ce petit paradis à la Milton, pas perdu pour tout le monde.
Arbres, arbustes, buttes, grand bassin ancien ceint de pierre (le domaine date de 1850), mare à grenouilles, ruches, planches de cultures amendées avec le fumier de cheval du haras voisin, et serre non chauffée, la nature, rien que la nature. Toute l’équipe de Ruche, le restaurant gastronomique du domaine, est impliquée dans ce projet total. La brigade est aujourd’hui 100 % féminine, pas par idéologie mais parce que les garçons passés par là ont toujours montré moins d’enthousiasme à s’accroupir pour mettre les mains dans la terre.
Astreinte de binette et grand art en cuisine
C’est pourtant par là que commencent les quatre jours d’ouverture : une demi-journée au potager pour chacun avant la mise en place du jeudi après-midi et le premier service de la semaine. « Certaines viennent même sur leurs jours de congé », se réjouit Cybèle. « L’une de nos anciennes cuisinières est devenue maraîchère », renchérit Franck.
C’est dans cette symbiose avec le vivant, cette attention aux produits poussant sur place que leur entreprise prend tout son sens. Le reste va presque de soi. « J’ai très envie d’aller encore plus loin dans l’anti-gaspillage », souligne Cybèle. Chaque plat est pourtant déjà pensé pour ne rien jeter, du jus de de la carotte en vinaigrette jusqu’aux fanes en pistou, de la noix de Saint-Jacques jusqu’au corail en émulsion et aux bardes dans une sorte de gomasio (ce condiment japonais au sésame, utilisé en alternative au sel, ndlr) aux graines de lin. Pickles, lacto-fermentation, séchage, Ruche est un nid d’idées qui enrichissent une carte enthousiasmante.
En voisin, on avait eu la chance d’y manger lors de l’un des premiers services, en septembre 2019, avant que le Covid-19 n’entre en scène. On avait aussi profité avec plaisir des menus à emporter, nécessité des différents confinements.
Mais, après deux ans de bataille pour résister à la crise, la cuisine a franchi un cap. Comme si le lieu, la cheffe et le mangeur ne faisaient plus qu’un, en parfaite harmonie.
En ce vendredi de février, outre les incroyables Saint-Jacques décrites plus haut, accompagnées de pomelo du Languedoc et de céleri rave, on a tout aimé – tout, on vous dit. Les pousses d’épinards à peine cuites dans un dashi de champignons, surmontées d’une émulsion de pommes de terre et de caviar, jouent la saison sans tricher. Idem les toutes premières asperges ferrées au chalumeau, les pointes au miso, recouvertes d’œuf confit râpé et de poudre de poireau brûlé. Le saint-pierre au beurre blanc planqué sous son chou-rave, avec un condiment poivre et kumquat à l’amertume bien dosée, est à la fois mystérieux et réconfortant. Les suprêmes de pigeonneau du Gâtinais parfaitement rosés, la cuisse généreusement confite, mais surtout les petits navets croquants, les myrtilles lactofermentées qui apportent l’acidité, et le pesto de romarin pour l’amertume, c’est du grand art.
Du pain et du vin
Dans la cuisine de Cybèle, le végétal n’est jamais un faire-valoir, c’est même le contraire. Notons que le pain maison vaut lui aussi le déplacement, servi sur demande et à juste proportion, pour ne pas gâcher. Quant à la carte des vins, concoctée par Franck, Champenois cœur fidèle, elle ne transige pas davantage avec la chimie que ne le fait le potager. Des breuvages sains et vivants, telle cette cuvée bio « Vin Blanc » du Clos du Tue-Boeuf, un sauvignon sublimé par le vigneron Thierry Puzelat qui nous a fait tout le repas.
Pour les becs sucrés (mais pas trop), on termine tout en fraîcheur et vivacité sur un pressé de poire boskoop avec une crème crue maison, une glace aux pommes et miel du domaine, une crème diplomate à la patate douce et au gingembre, avec en prime une déclinaison autour du chocolat du génial Nicolas Berger**, torréfacteur de cacaos et chocolatier. Ah non, on n’en avait pas tout à fait terminé. Une mignardise contenant un caramel au clou de girofle aurait pu nous faire rester jusqu’au dimanche. Les cinq chambres du domaine, d’un charme douillet et sans ostentation, sont là pour ça, au calme et en prise directe avec le parc.
Avant de vous diriger vers quelques belles adresses autour du Domaine les Bruyères, signalons les beaux projets de Cybèle et Franck : une taverne aux tarifs plus accessibles avec cuisson dans le four à pain qui trônera bientôt dans une extension face au jardin. Mais aussi un spa sans chichi dans l’esprit de ce que les Roellinger ont bâti à la Ferme du Vent, à Cancale. Sans la mer mais avec un tout aussi bel horizon.
S.M
Nos bonnes adresses proches de Paris
Recommandées par Cybèle et Franck Idelot, mais aussi par votre correspondant spécial des Hardis dans le western francilien.
Dans cette ferme agroécologique autonome en énergie (chaudière à bois et méthaniseur), s’ébattent 150 vaches laitières et 350 chèvres et boucs. Avec le lait, on fabrique entre autres un camembert fermier, un bleu de jersiaise et un persillé de chèvre.
Chemin de la Tremblaye,
78125 La Boissière École,
T. 01 34 85 03 63
Depuis 1987, on élève ici des canards en plein air dans des parcs enherbés, nourris avec le maïs cultivé sur place, garanti sans OGM. Cybèle cuisine principalement les magrets mais on peut aussi y trouver du foie gras, parfois des coeurs de canards gras.
3 route de Richebourg,
78550 Bazainville
T. 01 34 87 69 65
Ferme Lecoq
À Longnes, près de Mantes-la-Jolie, Julien et Céline Lecoq élèvent et vendent en direct poules, pintades et canards, qui vivent à l’air libre et mangent du grain venu d’un champ voisin. Cybèle aime y trouver des poules de Houdan, race emblématique de la région.
Hameau de la Fortelle, rue des Vignettes,
78980 Longnes
T. 01 30 42 55 68
Adrien et Benjamin Pelletier ont repris la ferme familiale pour devenir paysans-meuniers-boulangers. À partir du blé de leurs 110 ha de terres en bio, ils font farine et pain, au levain bichonné par leur associée Hélène Chaudy, mais aussi du quinoa. Ils ont fédéré maraîchers, éleveurs, brasseurs & co dans leur boutique ouverte du mardi au vendredi.
17 rue Saint-Martin,
28410 Broué
Sur le site d’un ancien château construit en 1554 et détruit en 1864, Alix de la Comble a confié la terre à Ali Kabbour et Xavier Nouvellon, paysans de père en fils. Ils y pratiquent le maraîchage sol vivant depuis 2018, pour des légumes exceptionnels.
La Tour de l’Ascanne, route du Mesnil-Simon,
28260 Saint-Ouen-Marchefroy
T. 07 71 07 72 70
À Auffargis, près de Rambouillet, Eric Sanceau, ancien cavalier professionnel, élève en patience, en responsabilité et en musique, des races oubliées de bovins (aurochs ou saosnoises), volailles (poules de Houdan ou de Faverolles) et cochons (mangalitza).
La Petite Hogue,
78610 Auffargis
T. 06 07 47 69 42
Sylvie et Alexis ont quitté leur vie de bureau pour ouvrir une épicerie en 2014. La réussite est au rendez-vous avec une partie primeur et une belle sélection de produits en tous genres, dont des références de vins sains (Matthieu Barret ou Jean-Claude Lapalut).
40 rue de l’Enclos,
78550 Houdan
T. 01 34 94 09 64
Arnauld Dufour a lui aussi tout plaqué pour le fromage il y a 10 ans. Il a débuté chez Laurent Dubois avant d’ouvrir sa fromagerie à Houdan, avec la même exigence que le MOF parisien. Le lait cru et la saison guident ses choix. On y trouve aussi le fameux pâté de Houdan de Sylvain Vandenameele, chef du restaurant La Poularde, une institution.
56 Grande Rue,
78550 Houdan
T. 01 30 41 85 65,
La Poularde,
24 avenue de la République,
78550 Houdan,
T. 01 30 59 60 50,
Après avoir appris son métier dans les Landes, Loïc Pioche est monté à Paris, puis à Beynes et enfin Houdan avec un atelier ouvert sur la rue. Il se revendique boucher et maquignon, soigne sa sélection et prône le manger moins mais mieux.
65-67 rue de Paris,
78550 Houdan
T. 01 34 86 75 01
