Gastronomie
La Table de Pavie
Restaurant coup de cœur à Saint-Emilion
20 JUIN . 2022
Il est certaines adresses que tout fin gourmet digne de ce nom ne peut se permettre de laisser de côté. La Table de Pavie en fait partie. Bastion bordelais du chef Yannick Alléno, cette table déjà doublement étoilée domine Saint-Emilion, au sens propre, comme au figuré. On s’attable ensemble dans l’un de nos restaurants préférés à Saint-Emilion.
Si vous visitez un jour le village de Saint-Emilion, nul doute que vous passerez, à un moment ou à un autre, devant la Table de Pavie. Perché sur les hauteurs du village de Saint-Emilion, le restaurant, anciennement Hostellerie de Plaisance, est inratable. Et pour cause : sa superbe terrasse jouxte le clocher de l’église monolithe, offrant l’une des plus belles vues sur le village et les vignobles alentours.
Mais ce n’est pas uniquement sa situation idyllique qui fait la réputation de la Table de Pavie. Depuis septembre 2020, les rênes de l’établissement ont été confiées à Yannick Alléno, actant au passage le changement de nom du lieu. Adieu Hostellerie de Plaisance, bonjour Table de Pavie !
Pas question pour autant de changer une équipe qui gagne : aux fourneaux, Sébastien Faramond, promu entre temps chef exécutif, est resté fidèle au poste. Ce chef discret retranscrit à merveille la cuisine pourtant si technique de Yannick Alléno, avec la même application qu’il avait mis à interpréter celle de son prédecesseur, Ronan Kervarrec. « Nous échangeons beaucoup avec le chef Alléno, tout au long de l’année. Il nous a enseigné toutes ses méthodes : extraction, cryoconcentration… J’ai vraiment appris à connaître sa cuisine ».
Dîner à la Table de Pavie est une expérience en soi. D’abord, parce que l’apéritif en met plein la vue, littéralement. Si le temps le permet, attablez-vous sur la terrasse tout juste refaite, face au vignoble. Là, le soleil couchant dessine un paysage sorti tout droit d’un tableau de maître, que les plus frileux peuvent aussi admirer derrière la verrière du bar. La magie se prolonge dans la salle, où de spectaculaires lustres en verre, dessinés par les Verreries de Bréhat, semblent goutter d’un plafond nuageux, signé de l’artiste contemporain Luciano Genovesio.
Le spectacle peut alors commencer. En 4 ou 6 plats, Yannick Alléno nous offre sa vision toute personnelle du terroir bordelais. Beaux joueurs, nous avons hardiment opté pour le menu Table de Pavie, en 6 services. Parmi les créations les plus renversantes, l’œuf poché en surprise de caviar d’Aquitaine, accompagné d’un velouté de cresson et d’une sauce à l’anguille fumée, qui vaut à lui seul le déplacement. Et si, comme nous, vous vous demandez qui du caviar ou de l’œuf a été préparé le premier, interrogez donc Sébastien Faramond, il vous donnera (peut-être) son secret.
Autre plat signature, le feuillet bordelais, à l’artichaut, céleri-rave, tombé d’oseille et vapeur de cognac (oui, oui), dont les subtiles notes sucrées salées laisseront vos papilles toutes ébaubies. Le carré d’agneau, à la gratinade d’oseille, huîtres et ris d’agneau, prend lui aussi une autre dimension, une fois nappé de sa sauce aux huîtres et olives mixées.
Car c’est là l’une des signatures de Yannick Alléno : le travail remarquable mené sur les sauces, notamment grâce aux procédés d’extraction et de cryoconcentration, qui lui permettent d’exalter les arômes de chaque produit. Pour accompagner les mets, l’abondante carte des vins (700 références tout de même) fait la part belle aux grands crus de Saint-Emilion et de la Rive Droite, avec les vins de la famille Perse, propriétaire des lieux, mais aussi un inventaire exhaustif des meilleures appellations de la région bordelaise, et de contrées plus lointaines.
Last but not least, le travail de revalorisation des produits effectué par le chef et son équipe, point hélas encore suffisamment rare dans ce type d’établissement pour être souligné. « Les abats du pigeon sont retravaillés en terrine, les bas morceaux du bar en brandade, le pain de la veille est utilisé en fond de tarte, tous les déchets de fruits et légumes sont mis au compost pour alimenter notre jardin aromatique… » énumère Sébastien Faramond. Objectif ? L’étoile verte bien sûr, nouvelle distinction du Michelin, mais aussi la 3e étoile, revendiquée haut et fort par Yannick Alléno. Sans aller jusqu’à oser affirmer que si vous n’avez pas vu Pavie, vous avez raté votre vie, nous n’avons qu’un conseil à vous donner : y filer.
C.d.S