Gastronomie
Escapade autour de Paris : séjourner à Fleur de Loire
Le Royaume gastronomique de Christophe Hay
09 SEPTEMBRE . 2022
Cap sur la Vallée de la Loire. Si l’on pouvait aisément vous transporter et vous faire découvrir la région à travers ses domaines royaux exceptionnels, à grand renfort d’illustres châteaux ou autres demeures majestueuses, c’est un tout autre royaume que l’on vous dévoile aujourd’hui. Un royaume de haute-gastronomie inauguré tout récemment, celui du Chef Christophe Hay, qui fait face au centre-ville de Blois. Rencontre.
Une maison gastronomique
C’est un édifice historique de 5000 mètres carrés en bordure de Loire, idéal pour une escapade autour de Paris. Mais ne parlez pas d’hôtel. On pénètre à Fleur de Loire dans une Maison Gastronomique logée au sein d’un ancien hospice chargé d’histoire, bâti au XVIIème siècle. On parle bien ici de restaurants avec des chambres, et non l’inverse. “J’ai avant tout pensé Fleur de Loire comme un lieu de gastronomie assorti d’une vraie expérience hôtelière et bien-être. Avec une envie : que chaque personne qui rentre dans cette bâtisse puisse se couper du monde et s’imprégner des ondes positives qui se dégagent du lieu.” Une déclaration d’amour du Chef Christophe Hay pour le terroir ligérien, qui s’incarne avec virtuosité au sein d’une offre plurielle (et gourmande) : deux restaurants (“Christophe Hay”, le restaurant signature, et “Amour Blanc”, son petit frère qui trône au-dessus de la Loire : l’approche y est plus accessible qu’au gastronomique mais bien loin du bistrot, l’établissement pourrait bien rafler une étoile…) et un kiosque à pâtisseries.
Pour le logis : un bel hôtel de 44 chambres dont 11 suites, soignées et tout-confort (Relais et Châteaux oblige !), conçues dans des tons poudrés. Et en extra : un SPA Sisley que l’on a visité au terme des travaux et qui devrait prochainement ouvrir, avec salles de soins spacieuses, piscine intérieure sous les voûtes (sauna et hammam), piscine extérieure avec vue sur la Loire couronnant le tout (on évoque ici un lieu qui sera dès Octobre 2022 l’un des plus beaux hôtels spa autour de Paris).
Christophe Hay, chef-agriculteur
Christophe Hay est un chef qui, incontestablement, à Blois, cultive son jardin. “On a un 1,5 hectares de culture et 2000m2 de serres qui nous permettent d’être autonome toute l’année. En permaculture et sans apport chimique. On porte aussi une vraie attention aux sols.” nous explique-t-il. Le Chef s’est même associé au Conservatoire des graines anciennes pour développer un conservatoire de l’asperge avec 50 variétés référencées “de sorte à faire revivre les terres maraîchères du Val de Blois.”
Comme un poisson (de Loire) dans l’eau, on l’accompagne déambulant dans son incroyable jardin. Courges, haricots, pommes de terre, tomates… Les mêmes que nous trouverons magnifiées un peu plus tard dans nos assiettes (patience !). Le potager a le don d’offrir à l’ensemble de l’établissement une autonomie complète. Bien loin d’un argument marketing, il s’agit là d’un engagement certain. Et d’un formidable terrain de jeu pour le Chef, comme avec ces tournesols géants et ces baies de goji avec lesquels il prévoit prochainement des expérimentations culinaires.
Christophe Hay, proclamé Chef-paysan, possède par ailleurs depuis plusieurs années un cheptel de plus de 70 bœufs Wagyu “confiés à des amis près d’Angers dans des prairies naturelles hyper préservées, avec une autonomie complète des céréales qui servent à nourrir les animaux. Avec 36 mois de prairies et 9 mois de finition au lin avec massages et musique pour donner un côté unique et persillé à la viande.” Un boeuf d’excellence, forcément, que l’on retrouve dans les assiettes de ses différentes tables. (Et spoiler : le boeuf est d’une tendreté incomparable – la meilleure viande que je n’ai jamais mangée à ce jour -, associée à une cuisson exceptionnelle et une garniture littéralement aux petits oignons). Sa démarche n’est pas soudaine mais complètement naturelle pour le chef, qui nous rappelle fièrement qu’il est “fils de boucher et issu d’une famille agricole depuis 5 générations du côté de [sa] maman.”
Le restaurant gastronomique Christophe Hay : tous en scène
C’est incontestablement au restaurant gastronomique que Fleur de Loire joue sa carte maîtresse (ou plutôt reine pour filer encore la métaphore monarchique). Devant nous la scène, comprenez la cuisine, qui tient plus que jamais sa promesse de “cuisine ouverte”, souvent faite, mais rarement aussi bien tenue.
Il est midi. Et le temps s’arrête. Le rideau est déjà levé lorsque la salle commence à se remplir. Les toques s’affairent sur scène. La salle, pensée comme un écrin lumineux et précieux plonge chaque “spectateur-convive” dans cette excitation des grands moments. La scénographie est travaillée. Je prends place côté jardin, aux premiers rangs. Le spectacle peut commencer.
Le Chef orchestre sa partition autour des trésors de la région. Celle-ci s’inaugure par une bouche triplement amusée, envoûtée entre autres par cette grandiose tartelette de tarama de brochet de Loire, coiffée d’un voile de pomelo. Puis le haricot vert du potager s’abouche avec le sureau, juste au-dessus de l’esturgeon cuit au bouillon, et vole presque la vedette au caviar de Sologne. Comme la sensation de croquer dans un haricot cru. Bluffé. On retrouve ensuite la tomate star du jardin, concentrée, comme une tarte, et sa consoeur qui barbotte dans une eau au poivre de sichuan. Réjouissant ! Autre tour de force, un plat de majesté, signature du Chef depuis des années : la Carpe à la Chambord dont la recette apparaît dans les livres de cuisine au XVIIIème siècle. La carpe s’épanouit ici parmi truffes, écrevisses et champignons travaillés en duxelle et en tuiles, et une sauce au vin rouge de Cheverny. Mythique ! Il y a aussi ce boeuf Wagyu exceptionnel, pomme de terre nouvelle, oignon de Florence, wasabina – que l’on évoquait un peu plus tôt… Le ballet est précis, la mise en scène rodée, comme du papier à musique. Le Chef, attentif, est au plus près de son auditoire, l’équipe vient également en salle présenter ses plats. Bref, une représentation de haute volée, conclue par une ultime gourmandise : les fraises de Monsieur Mercier, crème fermière, huile de colza torréfié.
Des idées, de la délicatesse, de la puissance, du goût, de la technique… au service d’une émotion. Celle d’un chef franc, attentionné et généreux qui catapulte la Loire tout en haut de l’affiche.
Un projet à “8 millions d’investissement personnel”, à la hauteur des ambitions du Chef que l’on imagine en quête de la distinction suprême (Christophe Hay affichait déjà deux étoiles dans son établissement de Montlivault, situé à quinze minutes de Blois). “Une grande fierté de pouvoir continuer à avoir des étoiles dans les yeux.” Les étoiles ? Fort à parier, que nous en retrouverons en nombre l’an prochain, épinglées avec honneur, aux accès de l’établissement. Mesdames, messieurs les inspecteurs, vous êtes prévenus !
G.B
Restaurant Amour Blanc
Plats à partir de 27€, desserts à partir 16€
Restaurant Christophe Hay
Menus à partir de 98€