Culture
Trois expositions à ne pas manquer à Genève
09 FéVRIER . 2023
Parce que Genève n’a pas à rougir devant Londres ou Paris en matière de programmations artistiques, cap sur la Suisse pour en prendre plein les yeux. Au programme ? Ugo Rondinone réveillant les collections du Musée d’Histoire et d’Art, la découverte d’un centre d’art atypique avec l’Espace Muraille et une exposition croisée entre Arts Lointains et Design au musée Barbier-Mueller… Pas question de s'ennuyer cet hiver au bord du lac Léman !
Andreas Eriksson à l’Espace Muraille
Logé dans un hôtel particulier historique, ou plus précisément dans les caves réaménagées de ce lieu hors du commun niché dans l’ancienne muraille de Genève, l’Espace Muraille est le cadre d’expositions d’art contemporain ultra pointues. Sous le commissariat de Laurence Dreyfus et jusqu’au 15 avril prochain, ce sont les travaux à la beauté méditative d’Andreas Eriksson qui sont présentés au public.
Il succède, entre autres, à Olafur Eliasson, Monique Frydman, Tòmas Saraceno ou encore Sheila Hicks pour ne citer qu’eux. L’artiste suédois a été remarqué au Pavillon nordique de la 54e Biennale de Venise en 2011 avec ses grandes peintures de troncs d’arbres jouant avec la notion d’intérieur et d’extérieur, de nature et d’architecture. Et c’est précisément de Nature qui traverse toute son œuvre.
Tandis que la carrière de l’artiste – alors installé à Berlin- se lance, un diagnostic est posé, il souffre d’hypersensibilité électromagnétique. Contraint de s’écarter de la vie citadine et des champs électromagnétiques, il s’installe dans la campagne suédoise, à Medelplana, près de Hällekis, aux abords du lac Vänern.
Un rapport au paysage qui infuse dans chacune de ses créations. Sans en être une interprétation littérale, ces œuvres se traduisent par une production plutôt conceptuelle de la sensation du paysage, dans un élan totalement contemporain.
A Genève, il nous accueille dans l’exposition avec une œuvre panoramique de très grand format (10m x 2m) «Night Painting», permettant une approche immersive de son travail, non sans rappeler l’expérience des Nymphéas d’un certain Monet. Également inspiré par la musique, l’artiste livre des œuvres emplies d’une grande sérénité, mêlés à une forme de musicalité. A la douceur des tons pastels et des tonalités ocres de ces toiles, s’opposent souvent des franches nuances de vert et des touches de bleu venant titiller l’œil du spectateur et rythmer la surface.
La série des 45 petits tableaux – les « Texture mapping » – présentée sous les voûtes de l’Espace Muraille, se dévoile comme tout autant de paysages intérieurs. A l’origine de ces toiles, de plus grands formats qui ne satisfaisaient pas l’artiste et qui ont été découpés pour donner naissance à cette série de petits formats ultra contemplatifs. Comme une topographie de l’intime, où l’intériorisation de la sensation laisserait place à l’expressivité dans son essence la plus absolue. Explorant différents médiums, l’artiste s’adonne également et non sans humour, à la sculpture comme avec ces moulages de taupinières provenant de son jardin et qui jonchent le sol de l’exposition ou avec ses deux arbres plantés « a second time ». Entre abstraction et figuration, visible et invisible, cette exposition se traverse comme un voyage poétique, invitant le spectateur à saisir la beauté infinie de la Nature qui l’entoure.
Espace Muraille
Pl. des Casemates 5, 1204 Genève, Suisse
du mardi au vendredi de 10:00 à 12:00 et de 13:00 à 18:00
le samedi de 13:00 à 18:00
ou sur rendez-vous
Andreas Eriksson, It takes two
26 janvier au 15 avril
Pensées invisibles au musée Barbier Mueller
Au cœur de la vieille ville de Genève se niche un tout petit musée d’une très grande importance. Car c’est dans cet immeuble historique du XVIème siècle faisant face à l’immeuble où vécut Jean Calvin que se loge une partie de la collection Barbier Muller, la plus prestigieuse collection au monde en matière d’arts lointains se tenant actuellement en mains privées.
Derrière ce nom- référence absolue dans le domaine -on compte plusieurs milliers de pièces de l’Antiquité tribale et classique, mais aussi de très nombreux sculptures, tissus et ornements de diverses cultures d’Afrique, d’Océanie, d’Asie et des Amériques, rassemblés dès 1907 par Josef Mueller, puis par son gendre Jean-Paul Barbier-Mueller. Ce musée qui vise à conserver mais aussi étudier ces pièces d’arts lointains organise à raison de deux fois l’an des expositions thématiques pour dynamiser la présentation de ses collections. Actuellement, ce sont les travaux de Zoé Ouvrier et d’Arik Levy, deux artistes contemporains, qui dialoguent avec des chefs d’œuvres d’arts lointains, rappelant combien le langage des formes est universel et atemporel.
Et si la plupart des œuvres conservées ici ont des fonctions rituelles liées aux coutumes des pays dont elles proviennent, les œuvres de ces deux artistes nous donnent, quant à elles, matière à penser notre présent occidental comme lié à un fil invisible à l’histoire de tous les arts.
Pensées invisibles par Arik Levy & Zoé Ouvrier
09 novembre 2022 -03 septembre 2023
MUSÉE BARBIER-MUELLER
rue Jean-Calvin, 10
1204 Genève
Tel. +41 22 312 02 70
E-mail : musee@barbier-mueller.ch
Ouvert 365 jours par an de 11h00 à 17h00
L’exposition astrale d’Ugo Rondinone au Musée d’art et d’histoire de Genève
When the sun goes down and the moon comes up
Après une exposition dans le Petit Palais à Paris, c’est au tour de Genève d’accueillir une exposition monographique consacrée à l’une des figures majeures de la scène contemporaine, l’artiste suisse (de naissance mais new-yorkais d’adoption) Ugo Rondinone.
Celui qui est à l’origine des Seven Magic Mountains, œuvres phares du Land art, explore tous les champs de la création. Aucune matière, aucune discipline ne lui résiste.
Faisant de son travail un terrain d’expérimentation infini, il signe des œuvres mêlant romantisme, humour et fantaisie. Jouant à domicile avec cette exposition When the sun goes down and the moon comes up ? au MAH de Genève- troisième carte blanche organisée par le musée au profit d’un artiste contemporain-il réveille les collections permanentes avec des installations donnant une nouvelle appréhension aussi bien de l’espace que des œuvres.
En bousculant la visite de ces collections historiques, l’artiste se donne l’ambition de révéler la face cachée des choses et incite le spectateur à reconsidérer sa place dans des contextes comme celui de grandes salles de musée ou d’espaces intimistes qu’il reconstitue comme avec les ateliers fictifs de deux peintres suisses majeurs Ferdinand Hodler (1853-1918) et de Félix Vallotton (1865-1925). Puisant dans les collections du musée, il agence deux espaces dans lesquels les artistes auraient pu vivre et travailler, et enveloppe ces lieux d’un papier peint (créé pour l’occasion) aux couleurs artificielles volontairement anachroniques (rose flashy, vert quasi fluo) ponctué de dessins inspirés des collections du musée. Avec cette exposition, Ugo Rondinone réussit le pari de lever le voile sur les œuvres classiques, parfois ensommeillées du MAH.
Qu’il teinte l’exposition en apposant des filtres colorés sur les vitres des fenêtres du musée, qu’il installe ses sculptures de personnages assis et d’un réalisme saisissant à même le sol de la salle des armes, ou ses créations magistrales the sun (2017) et the moon (2020) de 5 mètres de haut repoussant les frontières de l’espace, ou encore qu’il place ses chevaux de verre en écho aux paysages bleutés d’Hodler, l’artiste nous entraîne dans un voyage spectaculaire dans le temps.
Où ?
Musée d’art et d’histoire
Rue Charles Galland 2
CH 1206 Genève
Quand ?
Carte blanche à Ugo Rondinone
When the sun goes down and the moon comes up
Jusqu’au 18 juin 2023