Dans les coulisses de la Manufacture Saint-Louis

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19SEPT. 2024

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Dans les coulisses de la Manufacture Saint-Louis

19 SEPTEMBRE . 2024

Écrit par Johanna Colombatti

Qui n’a jamais rêvé d’infiltrer les coulisses d’une grande fabrique ? Se glisser dans les ateliers pour observer les artisans produire les trésors qui font le rayonnement de la France à l’international ? On l’a fait pour vous et on est allés découvrir la manufacture Saint-Louis, fabricant de luminaires et d'arts de la table en cristal depuis plusieurs siècles … Visite !

© Maxime Verret

C’est dans le cadre pittoresque d’un petit village reculé des Vosges, nommé Saint-Louis-lès-Bitche au pied d’une immense forêt que se loge l’une des plus vieilles et des plus célèbres manufactures de France. Et pas n’importe laquelle puisque que le site existe comme manufacture de verre depuis 1586 et devient quasi deux siècles plus tard « verrerie royale » sous Louis XV, prenant l’appellation Saint-Louis en hommage au roi Louis IX. Peu de temps après son sacre en 1767, la verrerie met au point en 1781 ce qui sera son plus gros succès : le cristal (dont le monopole était jusque là détenu par l’Angleterre), un matériau qui revêt une incroyable capacité à absorber et diffuser la lumière. Si Saint-Louis continue un temps de produire du verre, elle se consacre à une production unique de cristal dès 1825 qui lui vaudra de nombreux lauriers dont la médaille d’or lors de l’Exposition Universelle de 1867. Une industrie toujours prospère, et qui a fait son entrée dans le groupe Hermès en 1989. Dans ce haut lieu du savoir-faire français, l’histoire du cristal continue de s’écrire grâce aux talents d’artisans et maître-verriers exceptionnels et de collaborations fructueuses avec la crème des designers contemporains. Suivez le guide !

En parcourant des yeux le village, on dresse rapidement le constat qu’ici tout est affaire de verre, ou plutôt de cristal et que le mot court sur toutes les lèvres, comme un sésame. Ici la passion transpire dans chaque geste, chaque regard, chaque parole.

© Maxime Verret

Et pour cause, la manufacture occupe une place prépondérante au sein du bourg, se déployant le long de nombreux et grands bâtiments où sont fabriqués puis stockés l’ensemble de la production. En entrant sur le site, on croise de nombreux uniformes bleu marine griffé « Saint-Louis » s’affairant et on songe que Wes Anderson aurait aisément pu y poser sa caméra pour capter ce ballet insolite auquel on se joint volontiers comme visiteur.

On passe la porte, d’abord du musée, où sont exposés les merveilles de la maison dont le fameux service Trianon (qui inaugurera la notion d’Art de la table si usitée de nos jours), des luminaires aux proportions spectaculaires et toutes les productions qui ont fait le succès de la Maison comme le cristal moulé ou pressé, le cristal filigrané, le cristal coloré dans la masse, l’opaline de cristal, le cristal doublé, voire triplé ou encore les presses papiers dont Saint-Louis est la seule cristallerie au monde à maîtriser encore la création.

Puis, une fois cette plongée achevée dans les collections de la Maison, on se dirige vers les ateliers. Se joue alors un spectacle que le visiteur est invité à observer depuis les passerelles qui surmontent ce qu’on nomme la Ruche- entendez par là les Ateliers – où chacun s’affère à une chorégraphie précise et minutée pour contribuer à la fabrication des objets ou luminaires qui partiront rejoindre les plus belles tables et demeures du monde. 

© Maxime Verret

La première étape est celle des ateliers du « chaud » où les verriers façonnent le cristal en fusion. C’est l’endroit où le mélange s’opère et la matière voit le jour. Mais aussi celui où elle prend forme puisqu’elle se travaille à très haute température, lorsque le verre se trouve à l’état visqueux et qu’il est malléable. Le verre est alors soufflé (on introduit de l’air dans une masse de verre en soufflant dans une canne) dans un moule pour prendre la forme définitive souhaitée. Lorsque la pièce est créée, elle passe dans les ateliers du froid pour être décorée par retrait de matière (taille, gravure) ou par ajout (peinture, émaillage, dorure…).

L’ensemble de ces gestes est d’une telle précision qu’ils ont été inscrits par l’Unesco au patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2023. Une manière de consacrer et de préserver ces savoir-faire pour les générations futures car l’activité de Saint-Louis n’est pas prête de décliner, bien au contraire. Face aux commandes sans cesse plus nombreuses, la Manufacture a dû se doter cette année d’un troisième four, véritable événement dans l’histoire de la maison.

© Maxime Verret

 

Et si les classiques font toujours vendre, la Manufacture ne manque pas de regarder du côté de la jeune création invitant régulièrement des designers et artistes à collaborer. Cette année, c’est au tour de l’ornemaniste Pierre-Marie de livrer une collection intitulée Chamade qui revisite la pratique de taille du verre à travers trois pièces d’apparat inspirées des tulipiers de Delft et des trompettes d’orgue ; et de la designer Stefania di Petrillo qui puise dans le savoir-faire de la maison en matière de luminaires pour fabriquer un lustre ultra contemporain composé de torsades qui servent habituellement à l’architecture des lustres et qui sont employés ici en éléments principaux, révélant dans leur nudité leur plus parfaite beauté.

Le cristal a de beaux jours, et de belles nuits,  devant lui …



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