Les Rouquins

Aucun doute, Les Rouquins il faut connaître. On peut passer devant la porte d’entrée de cette sublime cave à manger des dizaines de fois sans jamais la remarquer. Devanture opaque, enseigne réduite à un nom sur une sonnette, on frise la clandestinité d’un caboulot interlope.

Derrière ces vitres aux armatures rouillées, passées au blanc d’Espagne, se cache une grande salle tout en longueur, aux vastes étagères embouteillées, avec en point de mire une large cuisine ouverte derrière son comptoir. On s’y accoude les jours de cohue (souvent) ou, si on a pris soin de réserver, on prend ses aises sur l’une des grandes tables d’hôtes, à la lumière des suspensions industrielles.

On y goûte une cuisine simple, aux produits sélectionnés avec une attention rare, superbes charcuteries espagnoles, salade de poulpe, chipirones et tomates anciennes délicieusement relevée, boquerones (anchois) presque confits et salade de pommes de terre fondante et depuis quelques temps à peine une petite sélection de plats chauds…

Côté vins, c’est le pré carré de Richard Liogier, grand connaisseur de liquides de toutes origines et de tous degrés. Mais ici, sachez-le, on a le tropisme languedocien : Côtes Catalanes, Côtes du Roussillon… Notre conseil ? Ne jouez pas au plus malin, laissez-le déboucher ce qu’il veut, vous ne le regretterez pas. Encore moins lorsque, la fin de service sonnée, il ne restera plus que quelques habitués (on le devient vite, ici) et que, portes fermées, ils démarreront leur dialogue langoureux avec les rhums des meilleures extractions.

Ah, et n’allez pas croire que le nom des Rouquins fait référence à la chevelure ensoleillée de Richard. Non, souvenez-vous plutôt de l’expression « Garçon, un rouquin ! » utilisée dans les années 60 pour commander son ballon de rouge. Une familiarité bon enfant et chaleureuse qui fait tout le charme de cet endroit.

On vous l’a dit : Les Rouquins, il faut connaître.

Thierry Richard