L’art du champagne par Maud Rabin

Quoi de plus normal, lorsque l’on possède des origines italiennes, espagnoles, polonaises et bretonnes, que de s’adonner aux joies de la mixité ? Convoquant aussi bien l’art de la joaillerie que celui de l’art contemporain, Maud Rabin a su redonner ses lettres de noblesse au champagne français, dirigeant telle une cheffe d’orchestre la maison Rare champagne.

Née à Angers, terre aux nombreuses caves et distilleries, elle voit son arrivée dans le monde des spiritueux comme un clin d’œil à sa ville de naissance : « Je suis issue d’une famille de négociants en vin. Ayant préalablement travaillé dans le monde de la mode, je n’avais pas du tout à l’esprit d’arriver un jour dans l’univers des vins et des spiritueux mais j’ai saisi cette opportunité en 2008 afin de relever un nouveau défi. » Défi qu’elle remporte haut la main, en restant presque une décennie à la tête de l’image et du plan communication de la division liqueur et spiritueux chez Rémy Cointreaux, à une époque qui se prête volontiers à la réinvention : « Les réseaux sociaux, dont Instagram, venaient d’arriver, il fallait imaginer de nouvelles façons de communiquer avec le public.« 

Secrets d’histoire

Maud Rabin dirige, depuis 2018, la maison Rare Champagne. Passionnée d’histoire, elle se plonge dès son arrivée dans le passé de cette maison d’exception afin d’en connaître les moindres secrets. Créé par Florens-Louis Heidsieck, fondateur de la maison Piper-Heidsieck, Rare Champagne se destine, en premier lieu, à charmer la reine Marie Antoinette, en lui offrant, dès 1785, « une cuvée digne d’une reine » si l’on s’en fie au document d’époque consulté par Maud Rabin : « J’ai fait énormément de recherches et je suis rentrée en contact avec les héritiers de la famille Heidsieck, dont François Harouard de Suarez d’Aulan, afin de reconstruire le puzzle de cette incroyable histoire. »

Rare Champagne – © Marco Strullu

Influenceuse avant l’heure, la reine commande de nombreuses bouteilles de ce breuvage, qu’elle trouve par ailleurs excellent, et voit aussitôt son geste copié par les cours européennes environnantes.

 Composée à 70% de Chardonnay sourcée dans la montagne de Reims, royaume du Pinot noir, les cuvées rare Champagne se distinguent par leur goût unique : « tropical, minéral et salin à la fois. Ce sont ces notes exotiques qu’appréciaient tout particulièrement Marie Antoinette et qui nous font encore voyager aujourd’hui. On y retrouve des parfums de coco, de vanille et d’épices.« 

© Marco Strullu

Dans une époque où tout n’est qu’immédiateté, la maison que Maud Rabin dirige joue la carte de la rareté : « Nous avons la liberté de sortir un millésime uniquement lorsque nos comités œnologiques décident qu’on peut le faire. On ne s’appelle pas rare Champagne par hasard.« 

Bulle d’art

Fascinée par le monde de l’art, Maud Rabin demande à la maison Mellerio, joaillier des cours royales (et notamment celle de Marie Antoinette) de réaliser le coffret dans lequel se trouve le Millésime 1997. Depuis, les créations de la maison se voit habillées par des artistes éclectiques que Maud Rabin sélectionne avec soin, à l’instar d’Arnaud Lapierre, designer qui réalise pour rare Champagne une sculpture de cinq mètres de diamètre en particules de miroirs, ou William Amor, qui orne les flacons de colliers et parures réalisés en matières recyclés : « L’amour de l’art et le respect de la nature font partie de mon ADN. »

© Ludivine Nakedcat

Un goût pour les belles choses que cette mère de deux enfants n’a eu de cesse de cultiver durant sa carrière : « Mon expérience dans la mode aux côtés de Madame Biche de Bere m’a beaucoup appris. Elle regardait toujours les talents underground et n’hésitait pas à bouleverser les codes afin de créer de nouvelles collaborations. Durant cette période, j’ai vécu en Chine ou aux USA et j’ai eu la chance de côtoyer des artistes formidables, ainsi que des personnalités singulières.« 

© Antony Dorfmann

 Désormais, celle qui vit entre Reims en Champagne et Paris continue d’insuffler sa force créative à la maison Rare Champagne, tout en se laissant rêver à des collaborations artistiques imaginaires :  » Mon rêve aurait été de collaborer avec Andy Warhol et de faire résonner son œuvre avec un artiste contemporain. » Contrairement aux bulles, les rêves peuvent se consommer sans modération : profitons-en.