Gastronomie
Mori Yoshida : des pâtisseries à se faire hara-kiri
20 NOVEMBRE . 2015
Le pâtissier venu du pays du Soleil Levant bouleverse le monde sucré parisien avec un doux fracas, sans matcha. Voilà deux ans que Morihide Yoshida s’est installé sur la calme Avenue de Breteuil avec le dôme des Invalides pour horizon et la tranquille aristocratie du quartier pour l’addition. Ouvrir une seconde adresse n’est pas son ambition, pis, ce serait une reddition à son principe de discrétion. Même avec le succès, il demeure dans son unique tour d’ivoire : une boutique qui clame le zen, en bois clair et verre, nimbée d’une douce lumière. Un écrin à mille lieux de Ladurée car ici le contenu l’emporte sur le contenant. Tout est fabriqué sur place, par cinq pâtissiers et trois vendeurs pour vous servir.
Formé à l’école Nippon Kashi Senmon Gakko, une référence, puis au Park Hyatt de Tokyo et sacré dans l’émission « Pastry Chef », c’est à Paris que Morihide Yoshida choisit de se lancer. S’il est venu en France, c’est pour y trouver et y travailler les matières premières de qualité précise-t-il dans un français discret. Et se borner aux grands classiques, qu’il revisite et sublime avec génie, même s’il n’ose l’admettre. « J’aime les choses simples. Même les pâtissiers contemporains se basent sur les classiques. »
Sa tarte au flan est parfaite : au moins 5 cm de douceur vanillée. On hésite à plonger sa fourchette dans son Mont Blanc, si belle est sa présentation en sapin enneigé de sucre glace. La Tatin est d’Or avec sa généreuse épaisseur de pomme caramélisée. Des bruns de vanille séchés viennent couronner de-ci de-là son fringant Vanillier et son Mille-feuille – évidemment posé sur la tranche, voici enfin un mille-feuille que l’on peut déguster convenablement. Sa Bûche de Breteuil (mousse au chocolat, ganache d’épice, confiture d’orange, crème au thé aux épices, praliné feuilletine) fera les belles heures des repas de fêtes des esthètes qui s’entêtent à venir chez ce samouraï, heureux gardien « lost in translation » de la pâtisserie française…
Anne Carpentier