Gastronomie
Bouillon Pigalle : le bienheureux retour du bouillon de culture parisien
08 JANVIER . 2018
Les règles sont strictes : on ne réserve pas, on fait la queue et on n’est placé qu’une fois au complet (« vous comprenez à ces prix là il faut que mes tables tournent…« ) Nous sommes au Bouillon Pigalle et voilà ce que l’on nous présente comme le renouveau du bouillon parisien (Chartier ouvert en 1896, Racine en 1906…), institution de la vie de la capitale, florissante dans les années 1900 et passée sous le manteau depuis.
Même ambiance bruyante, même foule bigarrée attirée ici par des prix ras-du-sol, même surface impressionnante (300 couverts sur deux niveaux ; avec une préférence pour le rez-de-chaussée, plus lumineux), mêmes globes suspendus et nappes en papier mais bien sûr ici tout sent le neuf. Même les tabliers noirs des serveurs débutants. On ne s’en plaindra pas, tout cela aura pris du jus d’ici quelques mois.
A la carte on enfile avec ravissement les lieux communs du genre, dans un style forcément à la française : œuf mayonnaise (1,90 €), poireaux vinaigrette (3,40 €), hareng pommes à l’huile (4,50 €), steak frites (10,50 €), bœuf bourguignon (9,80 €), blanquette (10,50 €), tête de veau (11 €), chou chantilly (2,90 €), baba au rhum (4,50 €)… Les portions sont convenables, l’œuf mayo un poil trop ferme, les mogettes de l’agneau de 7 heures un peu trop farineuses mais la blanquette fait bien le job, le pâté-croûte au foie gras (l’entrée la plus chère de la carte à 8,80 €) est tout a fait respectable et la profiterole ravive avec bonheur la tradition.
Côté breuvages, pas de sophistication : on choisit son contenant (quart, demi, bouteille, quille, magnum…), sa couleur (deux rouges, deux blancs et un rosé) et envoyez, c’est pesé. Difficile de cacher une petite satisfaction réac à s’entendre commander, à la manière d’un Lino Ventura en noir et blanc, un petit quart de Côtes (du Rhône, bien sûr) pour donner à réplique à la blanquette de veau…
Le service en rodage n’a pas le charme des vieux serveurs de Chartier mais compense son inexpérience par l’énergie de la jeunesse (il faut en dérouler du kilomètre pour servir 300 couverts dans une salle toujours pleine).
Alors même si l’assiette n’a ici rien de hautement gastronomique – ce n’est pas l’idée –, on ne peut que se réjouir de voir de nouveau fleurir à Paris un bouillon chaud bouillant, proposant dans un décor plaisant sa cuisine ménagère de bon aloi, pour une addition qu’on aura du mal à élever au dessus des 20 €. S’y côtoient bobos et prolos, familles et touristes bien informés, célébrités et habitants du quartier, dans une atmosphère vibrante, très parisienne. Une adresse très Grand Duc en somme.
Thierry Richard
(Texte et photos)
Bouillon Pigalle
22 boulevard de Clichy
75018 Paris
Téléphone : 01 42 59 69 31
Ouvert tous les jours
Pas de réservation
A la carte, compter entre 15 € et 25 €
Métro : Pigalle