Le caviar à la bouche dans le nouveau restaurant Petrossian

Gastronomie

25JUIN. 2018

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Le caviar à la bouche dans le nouveau restaurant Petrossian

25 JUIN . 2018

Écrit par Thierry Richard

Certains disent qu’il ne révèle sa majesté que dans le plus simple appareil, une pomme de terre, de la crème fraîche et voilà la vérité nue et sublime du caviar. A vrai dire c’est un peu notre opinion. Nous avons donc voulu savoir ce qu’il donnait en gastronomie, cuisiné à toutes les sauces. Direction le tout nouveau restaurant Petrossian, pour un tasting salé.

 

On avait connu le restaurant un peu “monde d’avant”, empesé dans ses icônes-miroirs-samovars, au dessus de la boutique phare de la Maison Petrossian, dont les délices d’un caviar d’exception et les spécialités russes peinaient à réveiller la douce torpeur. Autant dire que notre impatience était grande d’en découvrir la version modernisée, ripolinée dans les meubles de l’ancien Il Vino d’Enrico Bernardo, juste de l’autre côté de la rue.

Une fois la porte poussée, pas de doute, on a changé d’époque. On vise le luxe, le calme et la volupté. Banquettes profondes, tables espacées aux nappes immaculées, boiseries claires, la couleur bleue en fil rouge, un comptoir en accueil et deux petites salles aux murs très joliment décorés d’une fresque marine évoquant, en marqueterie de bois, les estampes d’Hokusai et sa vague célèbre. Le décor aux essences marines, très réussi, reste chic avec sobriété et invite aux propos feutrés.

Ce sont ceux qu’échangent une clientèle triée sur le volet, sage comme le quartier, discrète et bien élevée où des hommes portant veste et des femmes en talons hauts conversent à voix basse, entre business et romance. Quelques touristes complètent également le tableau des amateurs de nourritures d’exception. Exception ? Oui, parce que bien évidemment, chez Petrossian, depuis 1920, c’est de caviar qu’il s’agit.

Et si on peut continuer ici à choisir son préféré (Ossetra, Baïka, Daurenki, Beluga, Ivoire…) avant de le déguster avec pommes vapeur et blinis, le propos consiste désormais à découvrir quelques belles compositions gastronomiques où le caviar et ses déclinaisons (pressé, maturé, liquide…)  jouent alternativement les divas ou les accessoires. Et il faut reconnaître que cela fonctionne plutôt bien.

Le Tarama maison servi en amuse-bouche est d’une rare finesse. Les “Ravioles de langoustine au shizo, jus de presse, caviar liquide”, malgré un dressage à la Pollock, sont d’un bel équilibre, avec des parfums jouant mezzo voce leur partition délicate. Le “Quasi de veau de lait, croustillants parmesan épinard, caviar maturé” se révèle une très belle surprise dans ses accords terre-mer assez corsés et puissants. L’”Oeuf parfait, émulsion de lait, chou fleur, caviar liquide et caviar maturé” étonne par sa construction un peu trop sophistiquée mais tient toutes ses promesses en bouche, le mariage de l’oeuf avec le caviar se révélant tout aussi séduisant que celui avec la truffe (pour rester dans les goûts simples…) Mais le frisson du dîner restera une belle assiette de “Tagliatelle de blé dur, sauce crème vodka, caviar ossetra”, d’une simplicité confondante, comme un évidence beurrée (attention toutefois à bien les demander al dente…) Les desserts pour leur part sont servis au plateau et font mieux que jouer les utilités sucrées.

On pourra bien sûr piocher dans la carte des vins une belle sélection de vodkas  : blanches ou parfumées, de blé, d’orge, de seigle, d’avoine ou de pommes de terre, elles sont plus d’une quinzaine à se disputer les faveurs de l’amateur. Pour notre part, un très joli Muscadet, “Les Laures” du domaine Bonnet-Huteau (bio) aura joué de ses notes fraîches et vives un excellent contrepoint à l’ensemble du dîner.

Elles sont peu nombreuses les maisons parisiennes ayant poussé l’art du caviar bien au-delà de la simple dégustation de crus sélectionnés. Incontestablement la Maison Petrossian en fait partie. Il faut donc aller goûter, pour quelques circonstances exceptionnelles, à ce plaisir rare. On regrettera juste parfois, mais il faut laisser le temps à cette adresse de trouver ses marques, une ambiance vraiment très sage…

 

Thierry Richard
(Texte et photographies)

 

Petrossian
13 boulevard de la Tour-Maubourg
75007 Paris
Téléphone : 01 44 11 32 32
Ouvert tous les jours
Menus déjeuner (sans caviar) : 39 € et 46 €
Menus “caviar” à 130 € et 170 €
A la carte compter autour de 90 €
Métro : La Tour-Maubourg
petrossian.fr

 

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