Gastronomie
Les Résidents, la halte chic des chefs nomades
22 OCTOBRE . 2018
Le nomadisme a le vent en poupe. Au delà des tables éphémères, voilà que se créent à Paris des restaurants en manière de résidences d’artistes, proposant une programmation de chefs itinérants aux talents (plus ou moins) reconnus. C’est le cas des Résidents qui accueillent pour quelques mois encore, à deux pas du marché de Levis, un duo pas manchot. Expérience sur le vif.
Thierry Richard
(Textes et photographies)
C’est un projet comme on les aime, que celui imaginé par Caroline et Gauthier Moncel. Une idée un peu folle, somme toute assez risquée, visant à accueillir dans leur restaurant bourgeois-bohème (forcément) du 17ème des chefs en intermittence, posant leurs casseroles, leurs recettes et leur inspiration pour quelques mois derrière la verrière indus’ de la cuisine ouverte des Résidents.
Il y a donc, ici, l’écrin, le décor invariable offert aux cuisiniers de passage qui deviendra pour quelques temps leur domaine. Un théâtre de très belle facture, conjuguant modernité et rusticité, alliant bleu canard, compositions fleuries, miroirs dorés tout en rondeur, murs de pierre et bar de bois nordique, tables brutes et sièges profonds. C’est chaleureux et accueillant.
Et il y a la cuisine, par nature changeante mais toujours passée au filtre du (bon) goût de Caroline et Gauthier. Celle que l’on déguste aux Résidents jusqu’à la fin de l’année, est celle d’ (ex-Kitchen Gallery et Salt). Des origines diverses, mixant Italie, Bénin, France et Corée du Sud (Antoine est italio-béninois et Kyung-Duk coréenne) dans un cocktail vibrant, malin, visant l’horizon et balançant ses thématiques fleuries et parfumées. Car le végétal a ici son importance, sans pour autant négliger la puissance des goûts et des saveurs.
L’entrée en matière semble tout juste sortie d’un sous-bois, faisant jouer ses teintes automnales au fond d’un bol bleuté. Ces “Cappelletti au foie de volaille, bouillon de champignons, échalote confite et sauge” surprennent par leur mélange de rondeur et de puissance et la somme d’herbes à y découvrir. C’est beau et profond comme une forêt de novembre.
Puis vient le “Magret de canard, épinards et pesto à la sarriette” dans sa belle composition en demie-lune. Cuisson impeccable du canard luisant sous sa peau caramélisée, bien à l’abri sous son toit d’épinards d’un vert claquant et fermes sous la dent. Un pesto épais ajoute une pointe poivrée à l’équilibre parfait du plat.
Des produits au top et une exécution inspirée, ce mantra est aussi celui des desserts. “Glace vanille fumée, raisin rosé Katharina et tuile aux graines de lin” d’une parfaite délicatesse au goût subtil et étonnamment fumé pour des raisins très juteux. Le must étant ce “Mochi glacé, glace cacahuète et ganache menthe-vanille” tout en moelleux des textures et confrontation des températures. Sucré mais sans plus, très joliment présenté dans son paquet cadeau d’opaline… On en redemande. Bravo Kyung-Duk !
Pour les amateurs, une belle sélection de fromages de Martine Dubois et une carte des vins bien ficelée. Goûtez donc le blanc d’Olivier Pithon, le P’tit Pithon des Côtes Catalanes, vous m’en direz des nouvelles…
On tirera deux leçons de ce déjeuner impeccable (oui, j’aime bien la morale des fables) : (1) il faudra suivre la programmation des Résidents à la loupe car Caroline et Gauthier ont le talent du sourcing et pas seulement pour les petits pois et (2) on ne perdra pas de vue le duo Antoine/Kyung-Duk qui, semble-t-il, ouvrira sa propre adresse dans la foulée en 2019.
A bon entendeur, salut !
T.R.
Les Résidents
78 rue de Lévis
75017 Paris
Téléphone : 01 43 80 40 36
Fermé samedi midi, dimanche et lundi
Menus déjeuner à 25 € et 28 €
Au dîner, menus à 45 € ou 60 €
A la carte, compter entre 50 € et 60 €
Métro : Villiers – Malesherbes