Ça cause chiffons au bar : Nicolas d’Estienne d’Orves, l’harmonie des contrastes

Ca cause chiffons au bar

03DÉC. 2019

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Ca cause chiffons au bar

Ça cause chiffons au bar : Nicolas d’Estienne d’Orves, l’harmonie des contrastes

03 DéCEMBRE . 2019

Écrit par Guillaume Cadot

L’écrivain Nicolas d’Estienne d’Orves – alias Neo – tient le verbe haut, aussi haut en couleurs que les tenues qu’il affectionne. L’épicurien un brin réac’, un brin provoc’, vient de publier une encyclopédie du mauvais goût qui n’épargne rien ni personne. On est allé discuter pantalon de velours fuchsia et pyjama au coin du feu… Alors, bon ou mauvais goût ?

Propos recueillis par Guillaume Cadot

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courtoisie éditions Lafon

Quel est ton rapport au vêtement ?

J’ai toujours aimé les couleurs vives et les tons qui se remarquent. Si on est passé du noir et blanc à la couleur au cinéma, cela n’a malheureusement globalement pas été le cas dans la vie réelle ! Tout le monde est habillé en gris, noir, taupe. Que du foncé. Moi, j’ai toujours aimé ce côté Arlequin. En 1989, j’ai été fasciné par la garde-robe du Joker dans le Batman de Tim Burton. Ma première épiphanie vestimentaire ! Je crois que je ne m’en suis jamais remis… Par ailleurs, je suis quelqu’un d’assez naturellement timide, alors les couleurs parlent à ma place… 

Le vêtement est très important pour moi. Je vis la plupart du temps en pyjama : j’écris le matin au réveil, jusqu’à midi. Ils sont tous bleu clair et viennent de chez Brooks Brothers. Mon grand-père portait les mêmes.

Pour mes vêtements d’extérieur, peu m’importe la marque, l’origine ou la qualité, ils sont très basiques. Je ne claque pas dans les fringues ! Mais j’achète des vêtements dont personne ne veut. Je ne passe pas mon temps à faire les boutiques. Je les use jusqu’à la corde. 

Ta première pièce fétiche ?

Il y a eu une bascule quand  j’étais en Hypokhâgne. Mon père m’avait donné un stock de noeuds papillon que je me suis mis à porter tous les jours. Je me suis créé ce personnage de 18 à 30 ans. J’avais poussé le vice jusqu’à dormir avec un noeud papillon, mais j’ai arrêté, ça m’étranglait ! J’étais beaucoup plus déguisé que je ne le suis maintenant. J’ai, depuis, toujours privilégié la cravate papillon à la cravate droite (régate). Il y a eu un avant et un après noeud pap’ !

Il y a aussi cette veste chinoise qu’avait achetée mon père avant ma naissance à la Compagnie de l’Orient et de la Chine. Je la porte toujours le matin (on confirme, ndlr).

Te souviens-tu de ton premier jean ?

Je n’ai porté que des jeans jusqu’au moment où j’ai découvert le noeud papillon. En pension je portais des 501. J’en ai encore quelques-uns, mais je suis trop serré dedans… Ca me va bien pourtant, j’ai de grandes jambes et un petit cul paraît-il ! Ils étaient bleus. Aucun intérêt.

“Monsieur, vous êtes un modèle d’harmonie des contrastes”

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courtoisie éditions Lafon

Ta tenue préférée, celle qui te caractérise le mieux, ta signature ?

Ma tenue préférée, c’est le pyjama. Et pour l’extérieur, je crois que ce qui me caractérise le mieux, c’est le dégradé rouge, rose et fuchsia que j’affectionne. Une fois, une dame m’avait arrêté dans le métro en me disant “Monsieur, vous êtes un modèle d’harmonie des contrastes”. Elle était critique de mode. Je portais un pantalon rouge, une chemise orange et un pull rose ; ça m’est resté !

Une pièce ringarde que tu adores dans ton dressing ?

Si tu les prends au cas par cas, elles le sont toutes… Par exemple, mon préféré c’est ce pull sans manche à col V, à motifs type Jacquard rouille et bleu encre. Pris seul, comme ça, il peut faire mal !

Pour ou contre la cravate au bureau ?

L’intérêt de la cravate, c’est qu’elle apporte une raideur plutôt élégante, cela évite une sorte de relâchement. Elle ne me dérangera jamais. J’aime bien les uniformes. Dans un groupe cela permet d’éviter les disparités. je n’aime pas le côté mou et avachi. La cravate, ça oblige un peu.

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© Guillaume Cadot pour Les Grands Ducs

Porter des sneakers après 40 ans c’est concevable ?

Je n’en porte pas. Si c’est pour faire du sport oui, sinon cela n’a pas d’intérêt ! J’en ai une paire pour marcher l’été tous les après-midi quand je suis en Amérique (dans sa retraite estivale, ndlr). Le diable c’est aujourd’hui ces énormes magasins de sport si laids qui fleurissent partout dans les villes. Comme celui de la rue des Rosiers, qui a pris place dans une ancienne librairie dont il utilise les vestiges. Un blasphème !

Plutôt blazer ou cuir ? 

Je n’ai jamais possédé de blouson en cuir. Je préfère les vestes de sport. Mais je n’ai pas de blazer… Avec le blazer il y a toujours un côté petit chef de gare ! Je lui préfèrerai toujours une veste en seersucker l’été.

Si tu ne devais garder qu’une pièce de ton dressing ?

Le pyjama. C’est le vêtement dans lequel je passe le plus de temps.

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Courtoisie éditions Lafon

Une référence style ?

 Mon camarade Ariel Wizman. Il a toujours des trucs incroyables. Lui, il peut porter des baskets. Sa garde-robe est un voyage génial, au même titre que sa bibliothèque ou que sa collection de disques.

La tenue idéale pour aller taper un casse-croûte au comptoir ?

J’aime prendre des repas, assis et servi. Je n’aime pas manger debout ! Donc, j’aime être vêtu à la hauteur des bonnes choses que je vais manger. Mais pas des vêtements trop serrés. Il faut pouvoir être confortable pour se mettre à table !

G.C | Image à la une © Noemie Kadaner

neo5A lire : Nicolas d’Estienne d’Orves, L’Encyclopédie du Mauvais goût, éd. Michel Lafon, Paris 2019, 15,95 €
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