Voyages
Un week-end à Thiers et ses alentours
Des couteaux mais pas que !
02 JUILLET . 2021
Bien sûr, vous savez qu’elle est la capitale du couteau. Vous avez bien un Laguiole rangé au fond d’un tiroir. Mais saviez-vous qu’avant cela, Thiers était plutôt la capitale du papier ? Que la ville à flanc de rocher est le point de départ de beaux parcours panoramiques, entre parc naturel régional, chaîne des Puys et rivière de La Durolle ? Connaissez-vous ses restaurants, ses chambres d’hôtes et ses bonnes adresses ? On vous emmène.
Au cœur de la vieille ville de Thiers, pierre feuille couteaux
Une maison rose aux colombages jaunes, d’autres à colombages bleus, gris ou bruns, des petites boutiques sombres surmontées d’étages en quinconce, de jolis encorbellements médiévaux, tandis que le pedde (appellation auvergnate des passages piétonniers) du coin des Hasards glisse sous les têtes grimaçantes des sculptures sur bois des chevrons soutenant depuis le XVe siècle les trois étages de cette ancienne maison de passe. Déambuler dans les rues du vieux Thiers, c’est s’offrir une étonnante plongée dans un passé médiéval qui vit naître la richesse de la capitale du couteau.
Les maisons à pans de bois s’enchevêtrent, des ruelles ont des airs de coupe-gorge puis débouchent sur une belle façade aux encadrements de pierre de Volvic, joliment restaurés. En tendant l’oreille devant la vitrine de la confrérie du couteau Le Thiers, rue de la Durolle, on entend la rivière gronder dans la vallée des usines, tourbillonner au « Creux de l’enfer », au pied de cette ville bâtie à flanc de rocher.
Une eau tempétueuse à l’origine de l’industrialisation d’un petit bourg agraire où quelques artisans ingénieux vinrent s’installer pour tanner leurs peaux au bord du courant ou laver et déchiqueter leurs chiffons destinés à faire du papier. Avant d’être la capitale du couteau, Thiers fut la reine du papier de très grande qualité.
Tout a démarré au pied de la colline, au Moutier, vers le Ve siècle, à côté de l’abbaye dont il reste aujourd’hui une église, une bâtisse et ses deux tours qui attestent l’ancienne grandeur. De tanneries en papeteries, les bords de la Durolle se peuplent, puis accueillent quelques rouets qui profitent de la force hydraulique pour émoudre les lames de couteaux (donner le biseau), et autres objets tranchants, pour les affiner et les polir.
Nos bonnes adresses à Thiers
Il reste encore un atelier authentique Chez Lyonnet dans la vallée des rouets, accessible à 3 km à l’est de la ville, par la route de Lyon. Cette départementale D2089, ancienne route des diligences entre Lyon et Clermont, creusée à flanc de rocher offre un beau panorama sur la ville et la vallée.
Arrivé à Chateau-Gaillard, tournez à la boulangerie, très petite, mais qui produit un pain si bon, et descendez vers la Durolle. Après le Moyen Âge en ville, c’est une plongée dans « un sanctuaire de travail ardent au sein d’une nature âpre et sublime » tel que décrit par George Sand dans La ville noire. La rudesse du travail -allongé sur un banc au-dessus de l’eau glaciale en toute saison- laisse songeur. Pour se tenir chaud, les ouvriers émouleurs dressaient leur chien à se coucher sur leur dos…. Cette visite complète celle du musée de la coutellerie qui propose une collection unique de tranchants illustrant six siècles de savoir-faire.
Thiers, au cœur du Parc Naturel Régional du Livradois-Forez, c’est aussi un coup d’œil flamboyant, à la fin d’une belle journée, depuis la plaine de la Limagne.
Limagne s’étend entre les puys volcaniques qui enserrent Clermont-Ferrand et le rocher de l’enfer sur lequel s’est accrochée, au fil des siècles, cette ville industrieuse dont les acteurs n’ont pas laissé un mètre carré de ce terrain si hostile, sans le conquérir, le bâtir, le discipliner, le cultiver.
Une vaste étendue de champs fertiles, à la terre sépia, riche des éruptions d’il y a 6000 ans et plus. Là où le très jeune Vercingétorix défit les armées de César lors du siège de Gergovie, en 52 avant JC.
Thiers, fière capitale du couteau
Le visiteur aussi part à l’assaut de cette citadelle sans forteresse, mais aux solides maisons de granit agrippées à la roche, aux immeubles cossus en pierre de Volvic, délaissés depuis des décennies, celles du déclin de cette ville fière et rude comme la géographie alentour et le climat hivernal d’autrefois. Que reste-il de ces milliers d’artisans et ouvriers talentueux animés pendant des siècles par leur devise, Labor omnia vincit improbus (le travail opiniâtre vient à bout de tout) ? Quelques brillants couteliers qui font perdurer le savoir-faire de quatre ou cinq générations.
Thiers, capitale du couteau, car à partir du XVe siècle, les couteliers firent des tranchants pour toutes les régions de France en tête desquelles Laguiole qui a si bien su commercialiser sa lame à l’abeille. Et ces Thiernois besogneux en oublièrent de concevoir et déposer leur propre couteau. Il faut attendre 1993 et l’initiative de Jean-Pierre Treille, fils de coutelier, pour que soit créer la Confrérie du couteau de Thiers qui rassembla des artisans, des industriels, des designers et des passionnés de coutellerie.
L’initiative déboucha sur Le Thiers, dont la ligne est résolument moderne. Il se décline chez tous les fabricants adhérents et pour différents usages, soit aujourd’hui 500 modèles. Et d‘ailleurs, vous pouvez, sur rendez-vous, monter votre propre couteau à l’Atelier Le Thiers, un centre de réinsertion par le travail ou à la coutellerie Robert David dont la très belle boutique fait partie des bonnes adresses. Au départ du montage, quatre outils et six pièces qu’avec un travail minutieux vous transformerez en un beau Le Thiers fait de vos mains !
Thiers gastronomique : la bonne chère et le vin
Une fois votre couteau en poche, direction le Brindezingue où trois excellences vous attendent : la vue à couper le souffle sur la Limagne et la chaîne des Puys, trois mille références de vins naturels et vins en biodynamie et Florence Datessen, la sommelière des lieux.
Cette ancienne infirmière s’est forgé une culture et un réseau si vaste de vins naturels qu’elle a été sélectionnée parmi les 100 meilleurs prescripteurs de vins d’auteurs du monde dans le livre Cavistes. D’une famille de professionnels de la gastronomie, c’est sa mère qui l’a initiée à l’œnologie avant qu’elle ne s’inscrive à des cours professionnels dans la Drôme à Suze la Rousse. « J’aime aller chercher le vigneron qui se dédie à sa vigne et son vin, qui va mettre en bouteille à la nouvelle lune. Il faut le rencontrer et discuter avec lui. Ce n’est pas possible de travailler avec des représentants » nous explique Florence Datessen qui insiste sur le rôle du caviste pour aider l’amateur à faire son choix. « Les vins naturels sont vivants. Je surveille leur évolution, je connais toutes mes bouteilles » assure cette passionnée.
Elle a ouvert le Brindezingue en 2016, « dans une petite ville tranquille car je voulais créer un lieu calme pour amateurs de bons vins et de cuisine bistronomique ». Sur la terrasse ou autour du bar en fer à cheval, le lieu est attachant, les vins si fruités, l’assiette simple et de qualité. Il faut cependant un peu de persévérance pour susciter la discussion avec notre caviste qui a tendance à privilégier ses vieux habitués plutôt que les nouveaux venus !
Autre table, autre style, les deux restaurants d’Alexandre Fauth, Cosina et Bocaria servent notamment des viandes Aubrac ou Salers de caractère.
Deux chambres d’hôtes, deux ambiances à Thiers
Et pour dormir nous avons retenu une adresse totalement insolite dans cette ville si gentiment provinciale : Minshuku, des chambres d’hôtes japonaises très épurées, dans le strict respect des règles nipponnes avec son mini jardin zen, bercé par les roulements de la Durolle. Emi est céramiste, éprise d’un pays où elle a longtemps vécu. Vous y retrouverez aussi sacs et pochons en tissu importés du Japon.
Thiers, c’est aussi la montagne thiernoise, à l’Est de la ville, qu’il faut explorer au fil des petites routes verdoyantes et sinueuses qui vous conduiront à Sainte-Agathe. Le charmant château de Vaulx et ses chambres d’hôtes dans ses trois jolies tourelles vous attendent pour des moments paisibles au coeur de la « Toscane d’Auvergne ». Détente garantie.
P.M-C
A Thiers, n’oubliez pas de…
Monter tout en haut de la ville pour jouir d’une vue époustouflante
Monter quelques uns des dizaines d’escaliers qui relient rues et ruelles du bas en haut de la ville
Monter du Moutier au pont de Seychalles au long de la Vallée des usines et de la Durolle
Nos bonnes adresses
Boulangerie pâtisserie Thomas et Amélie,
LD Château Gaillard,
Thiers
Coutellerie Robert David,
94 rue des Etats-Unis,
Thiers
T. 0473800777
Atelier Le Thiers,
2 rue Alexandre Dumas,
Thiers
T. 0980313021
Brindezingue,
18 rue Camille Joubert,
Thiers
T. 0677344350
Cosina,
rue du Bourg,
Thiers
T. 0443141266
Bocaria,
rue Lasteyras,
Thiers
T.0473945333
Minshuku, chambres d’hôtes japonaises,
2 impasse des Tanneries,
Thiers
T. 0625985935
Chateau de Vaulx,
63120 Sainte-Agathe
T. 0473515055 – 0642011194
Mail ph.vast@orange.fr