Rencontre avec le designer Alfredo Häberli

Vous êtes fan des montres des années 60 et 70 ? Pourquoi ? Pourquoi ce retour sur le vintage ? Et pourquoi les années 50, 60 et 70 sont-elles devenues si tendance ? Avez-vous une explication ?

Pour mes 18 ans, j’ai reçu de mon père une montre qu’il avait lui-même reçue de son père au même âge. Ce fut le déclic de ma passion pour les montres et le « big bang » de la collection qui s’en est suivi. Au début, mon approche tendait plus vers la typologie, la forme et la couleur des montres. Puis, durant mes études de design, mon intérêt pour les fantastiques années 60 et 70 de l’industrie horlogère suisse s’est intensifié.

Le basculement vers de nouvelles inventions, incluant de nouveaux mouvements et fonctions, en a été le point culminant. Puis il y a eu de nouvelles visions en matière de design, le départ pour la lune, la conquête spatiale et les ordinateurs. Ces moments d’aisance, de légèreté et d’apesanteur ont toujours un impact aujourd’hui. En outre, les nouvelles technologies utilisées de nos jours sont vite obsolètes, alors qu’une montre mécanique continue de fonctionner aujourd’hui, et continuera. C’est précisément pour cette raison que les montres fascinent toujours autant.

En quoi les montres de ces années-là sont-elles reconnaissables en termes de design ? La forme ovale en serait une ? Pourtant, il semblerait que la montre a trouvé sa forme ovale caractéristique presque par hasard… ? C’est pourtant caractéristique des années 60 non ?

Le design des années 50 se caractérisait par une finesse, une modernité, des teintes voyantes, et aussi un certain arbitraire. Parfois, cela pouvait même friser le maniérisme, comme dans la mode, l’architecture ou le design.

Dans les années 60, l’Amérique a eu une forte influence. L’Europe, elle, était à la traîne mais affichait un esprit libre. Les formes et les technologies se développent rapidement. Chaque pays avait ses propres visions et les expériences se multipliaient. L’art, la mode, le mobilier et l’industrie automobile expérimentent de nouvelles pistes sans précédent.

Pour ce qui est de la Rado DiaStar, celle-ci repose sur une géométrie claire et simple, basée sur une série de cercles concentriques et un cône, ses techniques de finition sont immédiatement perceptibles.

Même lorsqu’on parle d’intemporalité ou de « classiques » aujourd’hui, à savoir les objets qui réussissent à passer l’épreuve du temps sur plusieurs décennies, il est toujours facile d’identifier à quelle période ces designs ont été créés. Cela demande juste d’avoir une connaissance de leur contexte.

Qu’est-ce qui change par rapport à la DiaStar originale, mis à part le Ceramos™ introduit par Rado ? Quels ont été les éléments distinctifs que vous avez introduits dans la DiaStar 60^e anniversaire ? Pouvez-vous expliquer votre choix (en matière de design) pour chacun des éléments (cadran, bracelets, forme du boîtier, aiguilles, matières, etc.) ?

Quand j’ai commencé à étudier les plans de la DiaStar des années 60, j’ai découvert sa géométrie. Des cercles et des segments de cercle avaient été dessinés géométriquement avec un compas (voir dessin). Je les ai changés de façon à ce que tous les points qui me dérangeaient formellement soient éliminés et convertis dans une approche plus actuelle. Exemples ? J’ai réduit la distance entre le bracelet et le boîtier. Le boîtier a été amélioré et conçu en *Ceramos™.

Le dessous a été simplifié. L’indication du jour n’est plus affichée dans une langue mais adopte une solution graphique internationale ». Le verre saphir a été découpé en 6 facettes, pour faire référence à son anniversaire, et l’hexagone se dote aussi d’un lien historique. La raison pour laquelle j’ai joué avec les nuances de gris, avec des surfaces brossées, polies, mates et réfléchissantes, consistait à la rendre moderne, contemporaine, abstraite et neutre. Le bracelet en maille milanaise et celui en tissu contrastent avec le reste de la montre et lui donnent un look complètement nouveau. L’écrin en cuir gris n’est pas là juste pour protéger la montre, j’ai voulu y apporter une valeur ajoutée lors de déplacements.

Quand vous avez été abordé par Rado et que vous avez vu la montre d’origine, qu’est-ce que vous en avez pensé ?

Il ne m’a fallu que quelques millisecondes pour dire oui ! S’il y a bien une montre qui mérite un nouveau design, c’est la DiaStar ! Si j’ai réussi en dix jours à redonner un nouveau design à la DiaStar c’est que cela fait près de 40 ans que j’étudie les montres. Préserver l’ADN de cette montre et faire en sorte qu’il soit toujours visible a exigé beaucoup de soin et de respect envers l’original.

Qu’un collectionneur m’ait surnommé le « nouveau » Gérald Genta a été pour moi comme recevoir un Oscar ! Mais les histoires ne se répètent pas… La chose la plus importante c’est qu’en l’absence d’une industrie compétente et la force d’un travail d’équipe, de tels miracles ne peuvent s’accomplir. En cela, j’exprime ma reconnaissance à tous ceux qui ont pris part à ce projet. C’est le début d’une belle aventure avec Rado.

Légende montre :

Lancée en 1962 et considérée comme « la première montre résistante aux rayures » remplit trois critères : confort, robustesse et design. Son boîtier en acier inoxydable se coiffe désormais de *Ceramos™, un matériau composite innovant possédant les propriétés de dureté de la céramique et l’éclat et la résistance d’un alliage métallique.

Les facettes hexagonales du verre saphir symbolisent les six décennies écoulées depuis le modèle d’origine. Son mouvement automatique (calibre Rado R764) offre une réserve de marche substantielle de 80 heures. Rado DiaStar Original 60-Year Anniversary Edition, Ø 38mm, étanche à 100 mètres, livrée dans un écrin gris accompagné de deux bracelets (maille milanaise + textile chiné), tous deux facilement interchangeables grâce au système EasyClip, 2 200 €.